A Gaza, Israël décide si les enfants malades vont vivre ou mourir

vendredi 15 décembre 2017

Yara, 4 ans et Aya, 5 ans, parmi les malades de Gaza morts de n’avoir pas obtenu un permis de sortie...
Yara Bakheet, 4 ans et Aya Abu Mutalq, 5 ans font partie des malades de Gaza qui sont morts cette année, faute d’avoir reçu un permis leur permettant de sortir de la bande de Gaza pour se faire soigner.
Un nouvel article de Amira Hass dans Haaretz fait état de cette triste réalité : le blocus de Gaza tue.
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La petite Yara souffrait d’une pathologie cardiaque qui aurait pu être traitée avec succès à l’hôpital Al-Makassed de Jérusalem Est, mais avec le permis de sortie que doit donner Israël, après consultation des services de sécurité (Shin Bet)

Une enfant de 4 ans pourrait être une dangereuse terroriste, n’est-ce pas ?

La mère de 28 ans, Aicha, explique qu’un premier rendez-vous avait été pris avec l’hôpital, mais il a dû être annulé, le permis n’ayant pas été délivré. Un deuxième rendez-vous a été fixé pour le 16 février et la famille a dû recommencer toutes les démarches auprès de l’administration militaire israélienne (documents, multiples fiches à remplir, preuves de la capacité de la famille à payer les frais médicaux, déplacement au bureau de liaison palestinien pour qu’il transmette l’ensemble à l’occupant.

Et pour ne pas risquer d’essuyer un nouveau refus, c’est l’arrière grand-mère de 72 ans qui s’est porté volontaire pour accompagner l’enfant malade jusqu’à Jérusalem. Une arrière grand-mère que la petite Yara ne connaissait quasiment pas, et qui a cru que ses parents l’avaient abandonnée....
De retour chez elle, et après avoir reçu des soins dans la bande de Gaza, elle a obtenu un nouveau rendez-vous à l’hôpital Al-Makassed pour le 2 juin dernier, et tous les papiers ont été dument transmis à l’officier de liaison palestinien.
Mais le permis est resté "à l’étude", et le rendez-vous a donc été raté. L’état de Yara, en l’absence d’un pacemaker non disponible dans la bande de Gaza sous blocus, n’a cessé d’empirer, jusqu’à son décès le 13 juillet.

En juin dernier le nombre de malades de Gaza attendant un permis de sortie était de 1.920, selon l’OMS qui indique que près de la moitié (951) en ont finalement reçu un, que 20 se le sont vu refusé, mais que 949 n’ont jamais eu de réponse et ont été obligés d’annuler leur rendez-vous à l’hôpital. Parmi eux, 222 étaient des enfants et 113 des personnes de plus de 60 ans.

En septembre dernier 42 % des demandes de permis pour traitement médical étaient toujours sans réponse et on dénombrait un total d’environ 20.000 patients ayant fait des demandes, avec des délais de réponse qui n’ont cessé de s’allonger ces 4 dernières années.

B’Tselem, qui cite l’OMS, fait état d’un triplement de la durée de réponse, alors que les trois quarts des demandes de soins concernent des hôpitaux palestiniens en Cisjordanie ou à Jérusalem Est.
Israel invoque "des raisons de sécurité", mais l’article de Haaretz souligne le grand nombre d’enfants et de personnes âgées parmi les "recalés" ou "en attente" d’une durée indéterminée.

Amira Hass prend le cas également de Fatma Biyoumi, 67 ans, qui souffre d’une maladie du sang et dont les rendez-vous pris à l’hôpital An-Najah de Naplouse comme à Augusta Victoria Hospital de Jerusalem, n’ont pu être honorés faute de permis.
Le groupe israélien des "Médecins pour les droits de l’Homme" a eu beau faire savoir qu’il se chargeait d’accompagner Fatma, celle-ci n’a pas pour autant obtenu de permis.
L’article cite plusieurs autres cas, dont celui d’Aya Abu Mutlaq, morte à l’âge de 5 ans, le 17 avril dernier, de n’avoir pas reçu le fameux sésame.

Le cas des femmes de Gaza souffrant de cancers est également très inquiétant, et leurs décès se multiplie. Elles ne disposent pas, à cause du blocus, de chimiothérapie, et les interventions chirurgicales pour ôter les tumeurs sont plus qu’aléatoires en l’absence d’électricité et d’essence à mettre dans les générateurs ! Quant à la radiothérapie n’en parlons pas : Israel ne laisse entrer ni les appareils ni les pièces de rechange dans la bande de Gaza. Quand on sait que les appareil permettant de diagnostiquer le cancer à un stade précoce sont également interdits d’entrer à Gaza, on comprend l’ampleur de cette catastrophe.

Le bureau de liaison palestinien et l’Autorité Palestinienne sont également mis en cause dans leur ralentissement à transmettre les dossiers et l’Autorité Palestinienne est accusée de faire de la rétention et d’avoir volontairement diminué le nombre de demandes de malades de Gaza qu’elle transmet à Israël.

"Si on ne tient pas compte des week-ends, ni des fêtes juives qui rallongent les délais, il faut compter entre 23 et 70 jours ouvrables, pour que le dossier soit traité et transmis par le bureau de liaison palestinien", indique-t-on de même source.
Source : https://www.haaretz.com