Abbas cherche sa survie politique auprès de l’occupant israélien

mercredi 26 janvier 2022

JPEG - 72 ko Milices de l’autorité de Ramallah bloquant une manifestation - Les autorités palestiniennes de Cisjordanie occupée ont lancé une terrible de répression en réprimant les manifestations pacifiques par la force, en procédant à des arrestations arbitraires de journalistes, de militants de la société civile et d’avocats, et en torturant les détenus, a déclaré Amnesty International - Photo : Amnesty International

Par Adnan Abu Amer

Abbas espère conserver un minimum de pertinence politique auprès des Palestiniens en obtenant quelques miettes économiques de la part de l’occupant, tout en s’engageant encore plus dans la collaboration répressive, écrit Adnan Abu Amer.

Le 28 décembre, le président de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas et le ministre israélien de la défense Benny Gantz se sont rencontrés au domicile de ce dernier. Il s’agissait de leur deuxième rencontre officielle depuis l’arrivée au pouvoir de l’actuel gouvernement israélien en juin. Les deux hommes s’étaient déjà rencontrés en août et avaient eu un entretien téléphonique quelques semaines auparavant.

Gantz et Abbas ont discuté de l’approfondissement de la coopération répressive entre l’Autorité palestinienne (AP) et le gouvernement israélien et des mesures à prendre pour atténuer la grave crise économique qui sévit en Cisjordanie.

La réunion a été soulevé des critiques des deux côtés. Le Hamas et d’autres organisations palestiniennes ont déclaré que la réunion était sans intérêt, car elle ne faisait aucunement avancer la cause nationale palestinienne, tandis que plusieurs personnalités politiques israéliennes, dont des membres de la coalition au pouvoir, l’ont considérée comme un premier pas vers d’injustifiables “concessions” aux Palestiniens.

Il est peu probable que Gantz et Abbas ne se soient pas attendus à la controverse que leur rencontre allait susciter. Alors pourquoi l’ont-ils quand même tenue et que signifie la poursuite de leur collaboration pour le conflit israélo-palestinien ?

Calculs politiques

Après avoir souffert d’un isolement international sous la précédente administration américaine, M. Abbas s’est empressé de revenir sur la scène internationale après l’entrée en fonction du président américain Joe Biden en janvier 2021 et la formation qui a suivi d’un nouveau gouvernement israélien sans le Premier ministre israélien de longue date Benjamin Netanyahou.

Le président palestinien a probablement considéré l’intervention de M. Gantz en juillet comme sa meilleure chance de parvenir à ses buts. Il est également possible qu’il espère que le ministre israélien de la défense suive les traces du défunt Premier ministre israélien, Yitzhak Rabin, qui était disposé à dialoguer avec les dirigeants palestiniens et même à signer un accord avec Yasser Arafat.

Abbas s’est rendu au domicile de Gantz à la recherche d’un “horizon politique” afin de poursuivre sur la voie des accords d’Oslo, dont il était un des instigateurs. Mais en Israël, personne n’évoque la possibilité d’un processus politique avec les Palestiniens et le Premier ministre Naftali Bennett a clairement indiqué qu’il n’y en aurait pas sous son gouvernement.

C’est pourquoi, Abbas n’a réussi à obtenir de Gantz que quelques miettes sur le plan économiques, destinées à atténuer la crise économique de l’Autorité de Ramallah. Il s’agit notamment de l’envoi par Israël d’une avance de 32 millions de dollars de taxes dues à l’AP et de l’octroi de davantage de permis de travail pour les travailleurs palestiniens et de permis d’entrée aux hommes d’affaires palestiniens.

Selon les médias israéliens, M. Gantz a également informé M. Abbas que le gouvernement israélien avait accepté que quelque 6000 Palestiniens de Cisjordanie et 3500 de la bande de Gaza soient inscrits au registre de la population palestinienne et reçoivent des documents d’identité.

Le registre est directement contrôlé par les autorités israéliennes d’occupation et l’AP ne peut y ajouter personne sans l’autorisation expresse de l’occupant israélien, ce qui laisse des dizaines de milliers de Palestiniens sans documents d’identité.

Pour Gantz, l’engagement avec Abbas est por lui une opportunité de s’approprier complètement le dossier palestinien et d’asseoir en conséquence sa position politique nationale et internationale.

Cette initiative lui vaut les faveurs de l’administration Biden, qui a fait pression sur le gouvernement israélien et l’Autorité palestinienne pour que ceux-ci reprennent des pourparlers. Elle lui permet également de se démarquer de Bennett, qui, craignant que ses alliés de droite ne l’abandonnent, est réticent à s’engager directement avec l’AP.

Le gouvernement israélien, malgré sa rhétorique fascisante, a intérêt à maintenir des relations étroites avec l’AP, notamment sur le plan de la répression.

La rencontre avec Abbas s’est déroulée dans un contexte d’escalade des opérations de résistance en Cisjordanie tout au long de l’année dernière et d’une recrudescence de la violence des colons et des forces d’occupation à l’encontre des autochtones palestiniens.

Ces attaques ont fait un certain nombre de morts et de blessés israéliens et palestiniens.

Gantz et Bennett savent tous deux que la sécurité des centaines de milliers de colons juifs illégaux en Cisjordanie dépend de la collaboration de l’AP. A cet égard, le ministre israélien de la défense a demandé et obtenu ces garanties de la part d’Abbas en échange des quelques mesures économiques qu’il a proposées.

Le gouvernement israélien soutient également l’AP parce qu’il craint qu’un effondrement interne n’entraîne une réapparition en force du mouvement Hamas en Cisjordanie.

Aucune voie possible