Charles Enderlin : un appel resté lettre morte.

dimanche 17 avril 2016

Charles Enderlin, analyste incontesté de la politique Israélienne nous rappelle que les questions actuelles sur l’avenir du Proche Orient se posaient déjà il y a plus de 30 ans.
Il faut continuer à se mobiliser sans désespérer.

[*1985*], dans le cadre du "Premier dialogue entre intellectuels juifs de France et d’Israël, Yaïr Auron a publié cette Lettre à un ami juif français - extraits -
« […] Israël se trouve à la croisée des chemins et doit décider de son avenir. L’États risque de s’engager dans une voie sans issue qui pourrait devenir impraticable pour beaucoup d’entre nous en tant qu’êtres humains que Juifs et qu’Israéliens. […] Israël s’est abstenu de définir son avenir. Ce non-choix, nous a entrainé dans la situation actuelle, celle où nous sommes en train de choisir de garder des territoires et de renoncer à la paix. C’est une décision capitale dans l’histoire de l’État d’Israël.
L’occupation des territoires [palestiniens] depuis 18 ans créent une réalité nouvelle. […] certains affirment que les implantations ont créé une réalité inchangeable et qu’en fait – sur le plan interne- l’option de rendre les territoires n’existe plus. Si cette affirmation est vraie ses conséquences sont considérables. Cela signifierait que nous avons accepté de vivre sans la paix et que nous sommes également coupables et responsables de cette situation de non-paix. Il y a quelques semaines, le premier contingent de jeunes nés après la guerre de Six jours a été enrôlé. Pour ces jeunes, la réalité de l’occupation et du « Grand Israël » est la seule qu’ils connaissent. Elle a pour signification le fait de devoir gouverner une population arabe ; mais il en émane aussi une peur profonde, émotionnelle et viscérale de l’Arabe, faite de préjugés.
Ainsi des principes fondamentaux comme l’égalité des hommes, le caractère sacré de la vie, l’antiracisme, la démocratie, la loi, sont remis en question. La réalité de l’occupation, avec tout ce qui en découle et l’absence d’un camp de la paix solide du côté arabe en général et palestinien en particulier ont été propices au renforcement de modèles extrémistes nationaux et religieux proposant des réponses claires mais superficielles à une réalité complexe. » Yaïr Auron donne pour exemple « l’opposition d’une partie importante de l’establishment israélien, de hauts fonctionnaires du ministère de l’éducation, de rabbins respectés etc. à l’organisation de rencontres entre lycéens juifs et arabes citoyens d’Israël. La raison e cette opposition : « la crainte d’une assimilation, de mariages mixtes ou même de conversions de jeunes juifs à l’Islam ». Derrière ce paravent de paroles sacrées se cache un racisme primaire facilement adopté par une partie de la société israélienne. […]

Supposons un instant que des ministres du gouvernement français interdisent à des lycéens français non-juifs de rencontrer des lycées Juifs français. Il est facile d’imaginer quelle serait alors la réaction du gouvernement israélien. Il me semble aussi savoir comment vous, jeunes intellectuels juifs français réagiriez.

La question qui se pose à nous maintenant est de savoir quel est le rôle d’un intellectuel Juif français, lorsque des choses de ce genre, parmi d’autres se passent en Israël ? Certains d’entre vous, nous ne l’ignorons pas, se battent en France contre le racisme, exprimant ainsi une longue tradition juive de lutte contre l’oppression et l’injustice. Si c’est votre condition d’être humain qui est à la base de cette mobilisation, dans quels domaines s’étend votre combat en tant que Juifs ?

Israël, en 1985, est une réalité très complexe au sein de la quelle se déroule une lutte entre deux visions opposées du monde. L’une composée d’éléments nationalistes et extrémistes, anti-démocratiques et xénophobes et l’autre d’éléments humanistes, libéraux et démocratiques qui ont représenté le courant central du sionisme, en recul constant depuis plusieurs années. Il me semble que c’est de ce conflit que se déterminera l’avenir d’Israël. Son issue aura des conséquences déterminantes sur l’avenir du peuple juif en tant que tel à l’aube du XXIème siècle. Quelle place et quel rôle occuperez-vous, intellectuels juifs dans ce combat ? "
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source : blog Charles Ederlin : https://charlesenderlin.com
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Sur le site de Palestine13 :
Netanyahu, la gauche israélienne et le boycott