Crimes et refoulement. La mémoire sélective de la société israélienne

mercredi 28 septembre 2022

« Avec le temps va, tout s’en va », « tout s’évanouit », chantait Léo Ferré. Cependant avec le temps parfois, tout revient aussi. On assiste en Israël à une succession de révélations concernant un passé peu glorieux. Ces révélations, pour la plupart, sont répercutées par le quotidien Haaretz, le « journal de référence » devenu de plus en plus critique tant de la politique des gouvernants à l’égard des Palestiniens que de leur politique passée.

JPEG - 563.6 ko Sabra et Chatila, 1982

La mise au jour de faits de l’historiographie officielle tronqués par les dirigeants sionistes durant des décennies n’a pas commencé aujourd’hui. De la fin des années 1980 au tournant de ce siècle, les « nouveaux historiens » israéliens s’activèrent à désacraliser le « roman national » bâti de toutes pièces par les fondateurs de l’État et à progressivement accréditer, archives à l’appui, la thèse des historiens palestiniens sur la colonisation puis l’expulsion massive des Palestiniens de leur terre. En 1993-1995, ils étaient des vedettes en Israël. Cette école, qui révisait les fakes historiques ayant accompagné la création d’Israël, s’est finalement désagrégée.

En revanche, les travaux de leurs successeurs, historiens, journalistes, documentaristes, et les récits de témoins ou de participants directs aux crimes commis par l’État d’Israël se multiplient. Rien là de très neuf. Souvent, c’est « avec le temps » que la vérité est rétablie. Interdit de télévision durant douze ans, Le Chagrin et la pitié, documentaire de Marcel Ophuls sur l’Occupation et la collaboration française avec les nazis sorti en 1969 fut une bombe. Et combien de temps a-t-il fallu pour que la France reconnaisse que la déportation de 13 000 juifs parisiens les 16-17 juillet 1942 ne fut pas menée par l’« occupant nazi », mais bien par des forces de l’ordre françaises (au service des nazis). Combien de temps a-t-il fallu pour la vérité éclate sur le massacre des Algériens de Paris par la police française le 17 octobre 1961 ? Quel État n’a jamais cherché à masquer des faits dérangeants du passé ? La différence entre Israël et la plupart des autres pays dans la confrontation avec le passé réside en deux données : d’abord, le rythme des révélations en Israël est assez ahurissant ; ensuite, leur impact sur l’opinion est bien plus faible qu’ailleurs.

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