Cyril Dion, auteur du roman Imago, à la librairie Maupetit le 26 et à l’Alcazar le 27 janvier

lundi 22 janvier 2018

RENCONTRE A LA LIBRAIRIE MAUPETIT

LE VENDREDI 26 JANVIER A 18H à la librairie Maupetit - 142 La Canebière 13001 Marseille

et

RENCONTRE à l’ALCAZAR - Marseille

SAMEDI 27 JANVIER À 17H Rencontre signatures avec l’auteur Cyril Dion Fondateur avec Pierre Rabhi du projet de société Colibris et co-réalisateur avec Mélanie Laurent du documentaire Demain (César du meilleur film documentaire en 2016), Cyril Dion publie son premier roman, Imago, chez Actes Sud.
Quatre récits de vie s’entrecroisent sur fond de conflit israélo-palestinien

entrée libre
Bibliothèque de l’Alcazar 58, cours Belsunce - 13001 Marseille
Tél. : 04 91 55 90 00 - accueil-bmvr@mairie-marseille.fr
Ouvert du mardi au samedi de 11h à 19h sauf jours fériés


[*Notre article du 5 novembre 2017*]
Pouvez-vous présenter à nos lecteurs votre premier roman Imago ?
C’est un roman choral autour de quatre personnages qui essaient de se libérer de ce qui les enferme . Deux vivent en Palestine, Nadr et Khalil, à Rafah dans la bande de Gaza ; il y a Amandine, une Française de 65 ans, ancienne militante dans l’humanitaire et dans l’écologie et qui a décidé de se retirer de la société ; et Fernando, un fonctionnaire, type FMI, qui est envoyé pour la première fois de sa carrière sur le terrain alors qui ne supporte pas cela. C’est un roman qui parle de ces quatre trajectoires de vie qui s’entrecroisent. Un roman porté par les recherches de Nadr pour retrouver son demi-frère Khalil, parti faire le djihad en Europe.
JPEG - 9.1 ko

Pourquoi vous êtes-vous intéressé à ce conflit plus particulièrement ?
Avant de créer l’ONG Colibri avec Pierre Rabhi, pendant cinq ans, j’ai organisé des congrès palestino-israeliens, ainsi que le premier Congrès mondial des imams et rabbins pour la paix, ce qui m’a amené à passer beaucoup de temps en Israël et en Palestine, à Gaza. Évidemment, on n’en ressort pas indemne. C’est extrêmement bouleversant. Cela m’a amené à m’interroger sur le quotidien de ces gens-là. J’avais envie de raconter l’histoire de personnages dont certains étaient dans ce contexte-là, mais ce n’est pas du tout un roman sur Israël et la Palestine… C’est un livre sur l’enfermement et la liberté. Il se trouve que certains personnages se sont retrouvés dans ce contexte-là parce que cela m’avait marqué.

Comment passe-t-on du documentaire à l’écriture d’un roman ?
J’écrivais déjà avant de faire des films… Faire des films, c’est aussi écrire. Pour le livre, j’ai vraiment fait un travail de montage qui était presque similaire à ce que j’ai pu faire pour le film "Demain". J’avais écrit les trajectoires des quatre personnages de façon linéaire et ensuite, j’ai tout déstructuré pour faire du montage. Construire des scènes, presque des séquences.

Quels sont vos projets ?
Je suis en train d’écrire un film de fiction, une sorte de continuité de Demain, de tourner un 52 minutes pour France 2 et d’écrire un essai intitulé Petit manuel de résistance contemporaine. Je m’interroge sur ce que signifie être un résistant aujourd’hui face à un système qui détruit les écosystèmes, continue d’augmenter les inégalités.

Propos recueillis par Julien Allain - la Montagne

Acte Sud - Hors collection
Août, 2017 / 11,5 x 21,7 / 224 pages
ISBN 978-2-330-08174-4
prix indicatif : 19, 00€

La critique de Sophie Joubert dans l’Humanité

Cyril Dion, la force des polarités contraires
Avant de fonder le mouvement Colibris, avec Pierre Rabhi, et de réaliser le documentaire Demain avec Mélanie Laurent, il a expérimenté sur le terrain l’impossible paix entre Israéliens et Palestiniens. C’est le sujet d’Imago, un premier roman puissant sur un jeune Palestinien qui veut empêcher son frère de commettre un attentat-suicide en Europe.

Il a rencontré le même jour les deux « monstres sacrés de la Palestine », Yasser Arafat et Mahmoud Darwich, le chef de guerre et le poète. C’était en 2004, Cyril Dion avait 26 ans. Il coordonnait le premier congrès mondial des imams et rabbins pour la paix, avec la fondation Hommes de parole, dirigée par Alain Michel. « On est arrivé dans un bâtiment à moitié détruit, avec des carcasses de voitures. À l’intérieur, des hommes regardaient une antique télé, assis sur un vieux matelas : c’étaient le ministre de l’Intérieur et le chef des armées… Arafat nous a fait un gros hug, c’était un peu bizarre. » Quelques heures plus tard, le chef du protocole l’emmène à la maison de la culture de Ramallah et lui présente Mahmoud Darwich : « Je ne savais pas qui c’était. À ce moment-là, j’ai compris la puissance politique de la poésie. »

Cette journée mémorable est la seule scène vécue d’Imago, un roman choral et sous tension qui suit la trajectoire de Nadr, un jeune Palestinien décidé à empêcher son demi-frère de commettre un attentat-suicide en Europe. Tout au long d’un périple qui transite par l’Égypte, Nadr, parti « avec la Palestine sur son dos », tente d’échapper aux assignations politiques et religieuses. Né d’une mère française, à qui il a été arraché par son père, palestinien, il est dans un perpétuel entre-deux, nulle part à sa place et sommé de choisir. « Le livre parle beaucoup d’enfermement, nos vies sont conditionnées par des facteurs extérieurs. » C’est le sens du titre : Imago, le stade final du développement d’un individu.

Trouver sa juste place : c’est la quête que poursuit Cyril Dion depuis l’enfance. Né dans un milieu « hyper bourgeois, hyper chrétien, avec des parents de gauche dans un environnement de droite, un grand-père général et un père banquier », il s’est construit en opposition, est devenu « antimilitariste, altermondialiste ». Le goût de l’art lui a été transmis par sa mère et une professeure de français qui lui fait découvrir le théâtre. Après le bac, il entre dans une école d’art dramatique, le cours Jean Périmony, et commence une éphémère carrière de comédien. De petits rôles dans des téléfilms en publicités pour la Française des jeux, il comprend vite que le monde est plus vaste. Il se forme à la réflexologie, masse les pieds des employés stressés de l’industrie du disque, puis croise la route d’Hommes de parole.
Réparer ses propres manquements, ses failles

Commencé en 2006, le roman a été laissé de côté, remanié, puis repris dix ans plus tard. Dix années pendant lesquelles Cyril Dion a multiplié les projets, eu deux enfants. Après l’engagement au Proche-Orient, il fonde le mouvement Colibris avec l’écrivain paysan Pierre Rabhi, crée une revue, Kaizen, et la collection « Domaine du possible », chez Actes Sud. Jusqu’au trop-plein. Un soir, à la sortie du concert de Rufus Wainwright, il s’effondre en larmes : « J’étais fasciné par sa liberté absolue, j’ai ressenti un dessèchement insupportable, je voulais recommencer à créer. » Après un burn out sévère et une thérapie, il se pose pour écrire le documentaire Demain, un tour du monde des initiatives positives pour résoudre les problèmes sociaux, économiques et écologiques. Un beau succès public. Quand la longue tournée de promotion du film se calme enfin, il reprend son roman, à l’été 2016.

S’il n’est pas autobiographique, Imago se fait l’écho des polarités contraires qui animent Cyril Dion et l’ont parfois cloué au sol. Le premier fil de la « pelote » romanesque a été le personnage de Fernando, fonctionnaire dans une organisation internationale, inspiré de Pessoa. Un être sec, qui se réfugie dans la littérature pour échapper au monde des humains. Il est l’autre demi-frère de Nadr. Leur mère, Amandine, vit retirée dans les bois après s’être épuisée dans l’action humanitaire : « J’ai vécu ce faux rythme de l’engagement. On se raconte qu’on va sauver le monde alors qu’on essaie de réparer ses propres manquements, ses failles. C’est sans fin », avoue Cyril Dion.

Quand on lui demande ce qui lui a permis d’arrêter cette fuite en avant, il marque un temps, sourit : « Ce n’est pas réglé, mais ça va mieux. » À Dreux, où il vit avec sa femme et ses enfants, il a créé avec deux amis un potager en permaculture, à côté de la maison de retraite : « On l’a appelé le potager des potes âgés. » Cultiver son jardin, retenir la leçon de Candide, n’empêche pas d’avoir le sens de l’humour.

JPEG - 21.2 ko