D’Hébron à Martigues, des enfants palestiniens découvrent le goût de la liberté

dimanche 31 juillet 2016

La collectif Palestine de Martigues accueille pour un échange interculturel 15 adolescents d’Hébron. Pour ces jeunes Palestiniens, c’est l’occasion de découvrir un pays mais surtout d’évoquer leur vie quotidienne faite de brimades et de peur.

Ils sont arrivés samedi 23 juillet vers 16h de Béziers, où ils avaient été reçus durant quelques jours par le Parti communiste, et ont pu prendre un goûter chez Micha, une des hébergeantes, avec des gâteaux offerts par un commerçant de Ferrières. Comme l’an dernier, l’association Maroc/Palestine organise un voyage de 5 semaines pour des enfants et orphelins d’Hébron, dans le cadre d’un échange interculturel avec la France.

A Martigues, c’est le collectif Palestine qui s’est chargé de les accueillir. Un voyage préparé depuis longtemps, afin de récolter des fonds pour leur séjour. Et si l’objectif est de faire découvrir la France (dont ils apprennent la langue) et d’offrir un peu de chaleur à des jeunes de 12 à 15 ans, il s’agit aussi de dire les conditions quotidiennes difficiles, voire dramatiques, auxquelles ils sont confrontés. « La Palestine est en train de crever dans un silence absolu et en même temps assourdissant. Pour le collectif, l’intérêt est de donner une tribune politique pour évoquer leur situation à Hébron, souligne Frédéric Grimaud, un des organisateurs. Hébron est une ville coupée en deux où, pour aller de la zone H1 à la zone H2, on passe deux heures dans les check-points si on est arabe. »
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Un chant pour dénoncer l’attitude des autres pays
Comme pour valider ce constat, en arrivant dans la famille, Malak entonne une mélopée. « Le chant s’appelle Oumo Arabia, qui signifie nation arabe, précise Brahim Melouki, enseignant en français à l’université d’Hébron et accompagnateur du groupe. Il critique le silence des pays arabes et du monde entier vis à vis de la politique d’Israël en Palestine. »

Ali, qui a fêté ses 15 ans la veille, a obtenu la meilleure note avec 97,5 points sur 100 au diplôme étude langue française (Delf) délivré conjointement par les ministères de l’Education nationale et des Affaires étrangères français. Et s’il hésite parfois sur des mots, il est explicite dans ses motivations : « Je veux découvrir une autre langue et une autre culture, mais je veux aussi parler de la cause palestinienne », affirme-t-il tranquillement, en avouant se réveiller tous les matins la peur au ventre : « Partout il y a des soldats, l’armée... pour aller à l’école, il faut passer des check-points. J’ai peur tout le temps. Ici, en France, je me réveille relax (sic). »

Pourtant, l’actualité est toujours présente dans leurs esprits. « Hier, c’est la vingtième fois en 10 jours que l’armée rentre dans mon village sous prétexte de chercher des gens qui auraient commis des actes contre Israël, relate-t-il. La résistance à l’occupation, pour les Israéliens, c’est du terrorisme, alors qu’on ne fait que se défendre. »
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La mer, si près et si loin

Malak aussi, valide ce point de vue : « On est un peuple occupé et Israël nous rend la vie infernale pour qu’on quitte le territoire. Même entre le domicile et l’école, ils mettent de plus en plus de barrages. La vie est difficile là-bas, en France on se déplace librement. » A 15 ans, elle parle déjà comme une adulte...

Tous les deux, en évoquant leur séjour en France, ont parlé de la Méditerranée à laquelle ils ont pu enfin accéder : « Tous les jours, je la vois de ma fenêtre, mais je ne peux pas y aller », raconte Ali. « On a vu des choses qu’on imagine juste, en Palestine, et auxquelles on n’a pas accès, comme la mer », ajoute Malak.

Malgré tout, ils ne baissent pas la tête, et c’est encore Malak qui l’exprime avec sa sensibilité : « On garde l’espoir, sinon on ne peut plus vivre. Puisque notre cause est juste, cet espoir nous permet de continuer à résister. »

Source : La Marseillaise - Nathalie Pioch

[**Rencontre avec Raghad et Ikhlas, deux adolescentes palestiniennes accueillies cette semaine à Martigues dans le cadre d’un séjour culturel et de solidarité.*]

Soirées festives organisées par deux maisons de quartiers de la ville, invitations au festival de Martigues, activités ludiques, plage, visite de la Cinémathèque : l’escale martégale de quinze jeunes originaires d’Hébron (Cisjordanie) est intense.

Membres de la délégation, les deux jeunes filles évoquent leur quotidien, leurs espoirs et leur séjour en France qui va se poursuivre dès aujourd’hui par une halte à Avignon.

Pouvez-vous nous parler de votre vie quotidienne en Cisjordanie ?
« Pour les enfants palestiniens, le problème, c’est d’abord la sécurité, tu deviens encore plus traumatisé et tu gardes ce cauchemar. Les Israéliens importent leur politique de guerre sur notre territoire : quand tu vas à l’école le matin, tu passes par un check-point où tu vas être fouillé, on t’ouvre le cartable et parfois, même la plume du stylo fait peur aux enfants parce que ça va provoquer le soldat. L’armée israélienne peut attaquer une école, leur objectif est d’interdire l’enseignement et l’éducation. Au retour de l’école, on passe encore par un check-point, parfois le même soldat te fouille une deuxième fois. On rentre à la maison et on craint encore qu’ils attaquent la famille. Même quand tu joues, tu as ce sentiment de peur mais on a toujours l’espoir de dire « demain, ils vont partir »

Justement, comment faites-vous pour conserver l’espoir ?
« Notre espoir se base sur les pays du monde entier, on n’attend pas seulement un soutien moral mais aussi politique et financier et au niveau national, on a besoin de l’unité. Il faut l’unité nationale, le soutien et la résistance sous toutes ses formes parce que l’union fait la force »

Quels souvenirs conserverez-vous de votre séjour en France, en particulier à Martigues ?. Est-ce qu’il y a des moments forts qui vont vous marquer ?
« D’abord, la façon dont les gens nous traitent, avec un certain humanisme, et l’accueil chaleureux. Les gens nous ont fait découvrir des choses qu’on n’ a pas chez nous, des activités de consommation et aussi des choses qu’on ne peut pas faire comme aller à la mer parce que l’armée et le gouvernement israélien refusent qu’on y aille. Ici, quand on est à la mer, on n’est pas sous l’occupation : c’est une liberté et ça donne de la force. Dans cette ville, on trouve que tout est beau »Retour ligne automatique
Propos recueillis par J-F.A.Retour ligne automatique
*Entretien réalisé grâce à la traduction de Brahim Melouki, enseignant à l’Université d’Hebron, accompagnateur du groupe.

* L’initiative, organisée par le Collectif Palestine ouest étang de Berre est soutenue par la LDH, le Mouvement de la Paix, Tous aziluttes, la Murette, Boud’femme, le CE de Naphtachimie, le PCF, Ensemble...

source : La Marseillaise

Brahim Melouki sur Maritima Info

le site du collectif Martigues - Palestine