Des massacres sionistes « exemplaires » : de Majd al-Kroum (1948) à Kfar Qassim (1956)

mardi 20 décembre 2016

L’histoire de l’entité coloniale sioniste est pavée par les massacres des Palestiniens et autres Arabes du Liban, d’Egypte, de Jordanie ou de Syrie. Mesurer la portée de ces massacres sur les survivants est important, non seulement pour reconstruire une histoire à une voix, celle des survivants, mais aussi et surtout pour empêcher une solution basée sur la négation, l’oubli, la négligence ou la minimisation du caractère foncièrement criminel de l’entité coloniale, fondée sur la terre volée de la Palestine.

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Majd al-Kroum, peu après le massacre sioniste de 1948
Rappeler les faits, tels que décrits par les survivants, ou mentionnés dans les archives sionistes que des chercheurs palestiniens décortiquent, sert avant tout à balayer les allégations sionistes qui, bien que reconnaissant certains massacres, les justifient par l’état de guerre, état qui aurait permis des « dérives » car les sionistes, sous forme de bandes armées de colons débarquant d’Europe, ou sous forme d’une armée ayant regroupé en son sein ces bandes de colons, auraient été, d’après toute une littérature coloniale et post-coloniale, européenne ou occidentale, de gentils fermiers animés par l’enthousiasme des pionniers colonisateurs des terres « vierges » et « en friche » mais menacés par des sauvages autochtones ».

Ces pionniers colons n’ont jamais été pacifiques, ni par le passé dans al-Jalil, ni à présent dans les territoires occupés de la Cisjordanie . Ils sont venus pour s’emparer, par la force, des terres et du pays qui ne leur appartiennent pas, mais que la communauté internationale de l’époque, ou d’aujourd’hui, de gré ou de force, leur a accordé le droit de s’y installer. Armés jusqu’aux dents, hier comme aujourd’hui, hier par les occupants britanniques et les tchèques, aujourd’hui par les Etats-Unis et l’Europe, ils ont mené et mènent encore aujourd’hui une politique systématique de destruction de la Palestine, sur les plans démographique (nettoyage ethnique), sociologique, politique, religieux, culturel et civilisationnel (judaïsation d’une terre arabo-musulmane, à partir de mythes bibliques et d’une histoire forgée par l’occident colonisateur).

Le massacre commis à Majd al-Kroum se situe dans le cadre de l’opération Hiram, menée par l’armée sioniste en octobre 1948. La « menace » arabe n’existait plus, il s’agissait pour les sionistes de poursuivre leur occupation et par conséquent, le nettoyage technico-religieux de la région d’al-Jalil. Des dizaines de villages côtiers avaient déjà été détruits au début de 1948 et leur population expulsée.

Le 29 octobre 1948, l’armée de secours arabe, qui était basée à Majd al-Kroum, rassemble la population pour lui annoncer son départ, et lui demande de ne pas abandonner le village, mais de rester pour ne pas tout perdre. Selon l’historien Adil Manna, qui reprend dans son dernier ouvrage l’histoire des Palestiniens demeurés en Palestine, après la Nakba, la même demande avait été faite par les volontaires arabes, à la population de Nasra, avant leur retrait de Palestine. Le 30 octobre, une unité de l’armée sioniste, l’unité 123, pénètre à Majd al-Kroum, qui remet les armes et accepte la reddition. Une centaine de personnes est réquisitionnée par l’armée d’occupation pour nettoyer et dégager les routes environnantes, ordre accepté par les Palestiniens en signe de soumission. Au moment où le village de Majd al-Kroum remettait les armes et signait sa défaite, l’armée sioniste commettait des massacres dans des villages avoisinants et expulsait ses habitants, comme dans le village de Ba’na, où l’armée de l’occupation a exécuté 4 de ses habitants avant d’expulser les autres vers le Liban, dans les villages de Aylaboun, al-Rama, et a commis le massacre de la population des Arabes d’al-Mawassi, le 1er novembre 1948, tuant de sang-froid, après arrestation, de 12 Palestiniens, dont des enfants. C’est également vers cette période (fin octobre, début novembre) que les villages de la région de Safad furent décimés, comme celui d’al-Safsaf, victime d’un horrible massacre accompagné de viol.

A la veille du massacre commis dans Majd al-Kroum, ce village comptait 2000 habitants auxquels se sont ajoutés des réfugiés d’autres villages décimés. Bien que le village ait été « pacifié » et soumis, une unité de l’armée d’occupation y pénètre le 5 novembre, et impose le couvre-feu. Elle ordonne à la population de se réunir dans la place al-Ayn, la principale place du village. Elle réclame que les armes soient remises, mais le maire explique que toutes les armes avaient déjà été remises le 29 octobre. L’officier sioniste insiste et déclare qu’il compte exécuter, toutes les demi-heures un jeune du village, si les armes ne sont pas remises. Les soldats de l’occupation fouillent les maisons pendant ce temps. 5 Palestiniens furent ainsi exécutés, des réfugiés ou des jeunes du village. Deux autres jeunes sont exécutés, alors qu’ils étaient en route vers le village, deux femmes également, lors des fouilles. Le massacre ne s’arrête que parce qu’un officier sioniste arrive sur les lieux et affirme que le village avait été déjà « pacifié ».

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Les martyrs de Kfar Qassem

De Majd al-Kroum à Kfar Qassem, la liste des massacres commis par les sionistes pour fonder l’entité coloniale, est horriblement longue. A Kfar Qassem, à la veille de la guerre tripartite menée par la Grande-Bretagne, la France et l’entité sioniste contre l’Egypte de Nasser, un couvre-feu est imposé le 29 octobre 1956, alors qu’une partie de la population travaille hors du village. A son retour, l’armée sioniste embusquée tire : 49 Palestiniens, hommes, femmes et enfants sont froidement massacrés. Non seulement l’entité coloniale a remercié les assassins ayant donné l’ordre de tirer et ceux qui ont froidement exécuté des Palestiniens désarmés, c’est la commémoration même du massacre par les survivants qui gêne à présent les colonisateurs, qui cherchent à l’interdire depuis quelques années.

Après le 15 mai 1948, date de la fondation officielle de la colonie sioniste, ce ne sont plus des bandes armées anarchiques qui commettent des massacres contre les Palestiniens, emportés par leur enthousiasme colonial, mais bien une armée fortement équipée et soutenue par l’occident impérialiste et l’Europe soviétique, qui assassine et exécute froidement les Palestiniens, en vue d’expulser un peuple hors de sa patrie. Le processus est toujours en cours, les colons envahisseurs qui dévastent aujourd’hui al-Quds et la Cisjordanie portent la même idéologie de ceux qui ont jadis dévasté al-Jalil au nord, al-Naqab au sud et toute la zone intermédiaire, dont les villes côtières de la Palestine et l’armée qui a jadis commis les massacres dans al-Jalil, dans la région de Safad et dans Kfar Qassem, commet aujourd’hui des massacres dans al-Quds, dans la bande de Gaza, à Jénine ou al-Khalil. La seule différence gît dans la légalisation par l’ONU et la « communauté internationale » des crimes commis par les premiers, sous le prétexte fallacieux de donner une terre à « un peuple sans terre ».

Le rapport de forces militaires ou le déséquilibre stratégique ne saurait travestir les données ni être la base pour des solutions au conflit. L’histoire nous apprend qu’ils peuvent être renversés, sinon modifiés.
Fadwa Nassar
ISM
photo du logo : Mémorial des massacres de Kafr Qasim le 29 October 1956


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