Israël. Le virus de la trahison brise tout espoir de paix

jeudi 9 avril 2020

Sous couvert de Covid-19, Gantz se met d’accord avec Netanyahou pour l’annexion des colonies de Cisjordanie avec le feu vert de Washington.

Quasiment en catimini, Benyamin Netanyahou et Benny Gantz ont mis un point final à leur accord politique dont la phase essentielle réside dans l’annexion d’une bonne partie de la Cisjordanie et donc de l’ensemble des colonies, comme le prévoit le plan Trump dévoilé au mois de janvier. Cet accord, qui entérine de fait le maintien de Netanyahou au poste de premier ministre, prévoit que l’annexion serait mise au vote de la Knesset (le Parlement israélien). À condition que le parrain américain donne son feu vert. Celui-ci est bien évidemment acquis, mais Washington – qui a déjà mis en place une commission qui planche sur le sujet – veut choisir le moment le plus opportun dans le cadre du calendrier électoral de Donald Trump. L’ambassadeur américain en Israël, ardent soutien des colonies, a laissé entendre que cette annexion pourrait avoir lieu cet été, si le danger du coronavirus est écarté.

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Benyamin Netanyahou, une fois l’accord passé, s’est empressé d’appeler David Elhayani, le chef du groupe de coordination de la colonisation du conseil de Yesha. Selon un communiqué de cette structure, le premier ministre aurait promis que le nouveau gouvernement agirait pour appliquer la souveraineté israélienne sur des segments des territoires palestiniens occupés dans les prochains mois. Selon une source proche du gouvernement israélien, Netanyahou a dit au chef des colons qu’il avait veillé à ce qu’il aurait l’entière responsabilité de la question de l’annexion dans le gouvernement d’unité, et qu’il le porterait aux voix « dans les prochains mois, sans la possibilité pour Gantz d’y opposer son veto ».

Sous couvert donc de lutte contre la pandémie – raison majeure donnée pour trahir tous ses engagements électoraux (notamment la promesse de ne pas siéger dans un gouvernement dirigé par un homme inculpé) – Benny Gantz vient non seulement à la rescousse de la droite religieuse et extrême, mais a envoyé un message de mépris à la face des électeurs de la Liste unie (communistes et arabes) qui, avec ses 15 sièges (score exceptionnel permis par la mobilisation de l’électorat arabe et du choix de nombreux juifs), permettait d’évincer Netanyahou. Ce qui montre que l’idée sioniste est incapable d’envisager une majorité autre que juive.

Le chef du Parti travailliste, Amir Peretz, va être nommé ministre

Mais, pour Gantz, il fallait parachever la trahison. Ce qu’il vient de faire en emmenant avec lui Amir Peretz, le chef du Parti travailliste (social-démocrate). L’homme, ancien ministre de la Défense lors de la guerre du Liban en 2006, avait juré ses grands dieux que jamais il ne participerait à une alliance avec Netanyahou. Il avait même rasé sa moustache, durant la dernière campagne électorale, pour que les électeurs puissent « lire sur ses lèvres » et soient persuadés de sa sincérité en ce domaine. Las, Peretz va maintenant être nommé ministre, sonnant ainsi le glas du Parti travailliste, qui ne disposait déjà plus que de trois députés !

L’accord d’annexion a suscité de vives critiques de la part de Hadash (Front démocratique pour la paix et l’égalité, créé par le Parti communiste israélien) et de l’alliance de la Liste commune, tous deux dirigés par Ayman Odeh. Celui-ci a condamné Gantz pour sa « capitulation la plus sévère à ce jour », affirmant que ce plan mettrait fin à tout espoir de solution au conflit israélo-palestinien. « Cela signifie tuer toute chance de paix et cela va cimenter un État d’apartheid avec des citoyens juifs et des sujets palestiniens. »

JPEG - 7.4 ko Pierre Barbancey
Source : l’Humanité