Israël s’ingénie à rendre les déplacements des Palestiniens toujours plus pénibles

samedi 30 juillet 2016

C’est une très ancienne stratégie de l’occupant israélien en Cisjordanie : rendre la vie des Palestiniens aussi pénible que possible, insupportable quand c’est possible, leur donner le sentiment que chacun des actes de leur vie quotidienne, jusqu’au plus banal, est étroitement conditionné par la volonté de l’occupant, sous sa surveillance constante, et chercher à obtenir une soumission inconditionnelle en multipliant les brimades et les humiliations.

Le “système des permis”, dont il existe plus d’une centaine de variétés de toutes sortes, est un des moyens privilégiés de cette oppression constante. Il a été de multiples fois décrit, et malgré tout toute personne qui mène une vie “normale”, dans un pays “normal”, a de la peine à se représenter ce que signifie d’être quotidiennement traités comme du bétail soumis au bon ou au mauvais vouloir (le plus souvent) des soldats de l’ennemi pour pouvoir simplement aller au travail le matin. Une série de photo publiée ICI naguère permet de s’en faire une idée.
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La journaliste israélienne Amira Hass, a depuis des années mis en évidence que les prétextes sécuritaires sempiternellement mis en avant par Israël ne sont, justement, rien de plus que des prétextes : les entraves systématiques mises aux déplacements des Palestiniens dans leur propre patrie – et singulièrement entre la Cisjordanie et Gaza – datent de bien avant l’apparition des motifs sécuritaires invoqués.

Et le système ne cesse de se complexifier, avec ce qui apparaît comme un luxe de raffinement dans l’art d’opprimer et d’humilier. Hier encore, Amira Hass mettait en évidence une nouvelle invention de l’occupant, constituant une nouvelle forme de punition collective et donc une violation supplémentaire du droit international humanitaire.
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L’Administration civile a créé une nouvelle catégorie lui permettant de refuser un permis d’entrer [en territoire israélien] en venant de Cisjordanie aux Palestiniens appartenant à la famille d’un suspect d’acte de terrorisme .

C’est la découverte qu’ont faite des militants du groupe Machsom Watch, qui assiste les Palestiniens à qui la sortie de la Cisjordanie a été refusée pour faire appel de cette interdiction. Des soldats appartenant à la “Coordination des activités gouvernementales dans les territoires [occupés]” ont explicitement fait mention de cette nouvelle catégorie devant des militants de l’organisation : “entrée refusée par la Direction des Opérations – sanction”.
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Le fait de refuser l’entrée à des Palestiniens dont des membres de la famille ont été impliqués dans des attaques terroristes ou ont été abattus par l’armée israélienne sans avoir été eux-mêmes impliqués dans une attaque, n’a en soi rien de nouveau. Depuis des années, de telles décisions ont été du domaine de compétences du service de sécurité du Shin Bet, et les personnes concernées étaient classées dans la catégorie des “entrées refusées pour raisons de sécurité”.

Mais il semble que le Shin Bet – qui a renvoyé les questions que lui posait Haaretz vers l’Administration civile – ne soit pas impliqué dans la création d’une nouvelle catégorie. Et il semble également, à en juger par les cas dont Machsom Watch a eu connaissance, que la notion de “lien familial” soit interprétée d’une manière particulièrement large, jusqu’à inclure des personnes qui portent le même nom de clan, mais qui ne connaissent pas personnellement le suspect ou l’attaquant.
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La plupart des cas qui ont été portés à l’attention de l’organisation concernent des Palestiniens des zones de Jérusalem et de Ramallah.

Un porte-parole de la “Coordination des activités gouvernementales dans les territoires [occupés]” (COGAT) a refusé d’indiquer quand cette nouvelle catégorie de refus d’accès au territoire a été créée, combien de personnes sont concernées jusqu’à présent et si la punition – la “sanction” – a démontré son efficacité. “En conformité avec une décision de l’autorité politique et en coordination avec les organismes de défense, à la lumière de la vague de terreur, il a été décidé de geler les permis d’entrée de tous les membres des familles des assaillants”, a déclare le porte-parole.
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Cet article a été publié par Haaretz le 11 juillet 2016 sous le titre “Israel Widens Scope to Deny Entry to Relatives of Terror Suspects”. Traduction : Luc Delval

JPEG - 6.4 ko Amira Hass est une journaliste israélienne, travaillant pour le journal Haaretz. Elle a été pendant de longues années l’unique journaliste israélienne à vivre à Gaza, et a notamment écrit « Boire la mer à Gaza » (Éditions La Fabrique)

source : http://www.pourlapalestine.be
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photos : Daniel Tepper, photographe à Ramallah spécialisé dans les pratiques et l’impact de l’occupation israélienne de la Palestine.
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