« Les soldats racontent » 
Editions Autrement,...

vendredi 17 janvier 2014

« Les soldats racontent »

Editions Autrement, 2013, 396 pages, 22 €

Samedi 11 janvier 2014

L’occupation israélienne en Cisjordanie et dans la bande de Gaza génère traditionnellement deux types de récits à fronts renversés : celui des Palestiniens, ses principales victimes, et celui des colons juifs, ses principaux bénéficiaires.
Censure militaire oblige, il est rare d’entendre s’exprimer les artisans de cette politique, à savoir les conscrits ou les réservistes et ceux qui tiennent les check points, ratissent les villes et gardent les colonies.
C’est ce qui fait tout l’intérêt du Livre noir de l’occupation israélienne, sous-titré avec justesse Les soldats racontent. Ce gros ouvrage, préfacé par l’historien Zeev Sternhell, l’une des consciences de la gauche israélienne, compile près de 150 témoignages de militaires, sur les plus de 700 recueillis depuis dix ans par l’ONG Breaking the Silence. Cette organisation veut tendre un miroir à la société israélienne, la confronter à ce qu’elle fait faire à ses enfants, dans l’espoir d’ébranler son apathie sur la question de l’occupation.
IMPUNITÉ TACITE
Les propos, évidemment anonymes, couvrent toute la décennie 2000, marquée côté israélien par les attentats-suicides de la deuxième Intifada, puis par un lent retour à la normale, qui a progressivement fait disparaître la question palestinienne du débat public. En rapportant les « méfaits ordinaires » commis par les soldats dans les territoires palestiniens, ces pratiques totalement banalisées, qui sont censées protéger Israël, mais contribuent avant tout à l’extension de la colonisation et à la mise à genou de la société palestinienne, l’ouvrage met en lumière la violence intrinsèque de l’occupation.
Cela va de réveiller un village en pleine nuit, à coups de grenades, pour intimider les habitants, de cloîtrer tous les membres d’une famille dans une seule pièce de leur domicile pour le transformer pendant des jours en poste de guet, de confisquer les clés d’un automobiliste pour un mot ou un regard de travers au check point, jusqu’à tabasser un père de famille sous les yeux de son fils, voire liquider des policier palestiniens non armés en représailles à une attaque meurtrière…
En filigrane de cette histoire orale émerge la culture de l’occupation, cette ambiance délétère, faite d’ennui, d’impunité tacite et de sentiment de toute-puissance, qui prive peu à peu les jeunes appelés de leur morale. « Au début, tu as l’impression d’être une espèce de nazi, raconte un soldat. Puis, au bout d’un moment, tu oublies cette idée (…). Alors tu suis le mouvement. Et ça te rend dingue. Vraiment. Un soldat qui ne devient pas fou, je pense qu’il a un problème. »
Le Monde
Le Livre noir de l’occupation israélienne.
Les soldats racontent
Editions Autrement, 2013, 396 pages, 22 €



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