Pierre Stambul. Pourquoi l’affaire est restée sans suite

lundi 6 juillet 2015

Pierre Stambul. Pourquoi l’affaire est restée sans suite ?

"Le militant de l’Union juive française pour la paix, interpellé à tort, a rencontré le Préfet de police. Aucune réponse n’a été apportée à sa série de questions.
Un chapelet de questions mais aucune réponse. Seule assurance, les 1.800 euros de frais engagés après que le Raid ait détruit sa porte d’entrée lui seront fina-lement remboursés. Pierre Stambul co-Président de l’Union juive française pour la paix ((UJFP) a rencontré lundi le Préfet de police, Laurent Nunez, et son directeur de cabinet Christophe Reynaud, sans que cela n’ait changé le cours des choses, encore moins le cours de sa vie.
Cible d’un activiste sioniste
Dans le nuit du 8 au 9 juin, ce militant des droits palestiniens est arrêté de manière musclée pour avoir prétendument tué sa femme qui était, à ses côtés bien vivante. Plus qu’un canular, Pierre Stambul est la cible d’un activiste pro-sioniste qui agit délibérément dans le but de lui nuire. Ulcan, de son vrai nom Grégory Chelli, avait également manipulé la police pour la faire intervenir chez les parents d’un journaliste de Rue 89, Benoît Le Corre, dont le père, sous le choc, est décédé d’un infarctus plusieurs jours après. Dans le domaine politique, seul le PCF a réagi et a demandé qu’une commission d’enquête parlementaire soit mandatée dans les plus brefs délais. Et c’est encore de cette immense solitude dont Pierre Stambul parle. « Qu’est ce qui est fait à propos de mon agresseur ? Est-ce que l’État français a porté plainte ? Laurent Fabius a dit qu’il en parlerait au Premier Ministre Netanyahou, mais aucune question n’a été posée. Pourquoi une telle violence ? » lâche Pierre Stambul, Les jours qui suivent son arrestation, cinq autres actes de ce type ont été enregistrés. « Je suis le seul à avoir subi des violences », répète l’ancien professeur de lycée.
Aujourd’hui la seule chose qu’il demande, c’est que ce genre de chose ne se reproduise plus jamais et que l’activiste soit mis hors d’état de nuire. « Très clairement, j’ai l’impression que il y a deux poids, deux mesures », poursuit celui qui a fait lire au Préfet des enregistrements téléphoniques de nature antisémite. « La haute autorité ne tolérerait pas l’antisémitisme », poursuit Pierre Stambul. Il a dès le début déposé plainte, et se demande s’il avait été sioniste, si les choses se seraient passées de la même manière. « Mon cas n’entre pas dans les rails, qu’ils en tirent les conséquences », poursuit-il, sans autre forme d’amertume".
Catherine Walgenwitz (La Marseillaise, le 1er juillet 2015)

l’affaire
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Arrestation musclée de Pierre Stambul, co-président de l’UJFP dans la nuit du 8 au 9 juin. Puis de Jean-Claude Lefort, ex-président de l’AFPS

http://www.mediapart.fr/journal/france/090615/le-militant-pierre-stambul-de-l-ujfp-ete-interpelle-par-le-raid-cause-dun-hacker?utm_campaign=2809989&utm_medium=email&utm_source=Emailvision

Le militant Pierre Stambul, de l’UJFP, a été interpellé par le Raid à cause d’un pirate informatique.

« Le Raid a débarqué au domicile de notre camarade Pierre Stambul », s’alarme l’Union juive française pour la paix (UJFP), dans un texte publié sur son site internet mardi 9 juin 2015. « Les forces de police ont utilisé le protocole pour neutralisation de terroriste retranché armé, poursuit le communiqué. Faisant évidemment chou blanc, le Raid n’en a pas moins appelé la police nationale qui a emmené Pierre menotté. » Selon le préfet de police de Marseille, Laurent Nunez, joint par Mediapart, le militant marseillais, co-président de l’Union juive française pour la paix, a été victime d’un « canular très bien monté » par un « hacker » pour l’instant encore non identifié.

Que s’est-il passé exactement ? Fils d’un résistant et rescapé du célèbre groupe Manouchian, Pierre Stambul, âgé de 65 ans, raconte ainsi son interpellation, joint au téléphone à Mediapart mardi en début d’après-midi :

« Lundi à 23h, j’ai reçu un coup de téléphone sur ma ligne fixe, qui est dans l’annuaire. J’ai décroché, on a raccroché. C’est comme ça que le hacker Ulcan a pu pirater ma ligne [sur sa page facebook, Ulcan dément - ndlr]. Il a ensuite téléphoné avec ma ligne à la police, en disant que j’avais tué ma femme, que j’étais armé et que je tirais sur tout ce qui bougeait. Mardi, à 3h50 du matin, le Raid a enfoncé les portes du lotissement où j’habite, plaqué au passage au sol le fils de mon voisin. Je suis sorti en disant : "Monsieur Stambul ? C’est moi." Les hommes du Raid m’ont mis au sol très violemment, me frappant à la mâchoire. J’ai été menotté pendant plus d’une heure, alors que la femme que j’étais censé avoir tué était à deux mètres. Ils ont ensuite passé le relais au commissariat de police du huitième arrondissement de Marseille, qui a attendu trois heures pour m’entendre, et qui a encore attendu trois heures après cela pour me relâcher, autour de 11h30. 7 heures de garde à vue pour un motif dont ils aurait pu vérifier l’inanité en deux minutes, et qui ressemblait qui plus est à trois autres aggressions du même type qui ont déjà eu lieu. »

« Il y a deux mois, poursuit en effet Pierre Stambul, encore très choqué, il y a eu exactement la même agression que celle que j’ai subie, contre l’autre co-président de l’UJFP, Jean-Guy Greilsamer, arrêté également chez lui suite à un canular. Deux autres militants en ont également fait les frais. C’est toujours Ulcan, hacker confirmé, et la police se laisse encore prendre au piège, c’est scandaleux. Et croyez-moi, vu la violence des policiers, un homme encore plus âgé que moi y serait resté. »

Pour lui, son arrestation est directement liée au contexte international : « Depuis quelques jours, il y a une campagne folle en Israël, qui a peur de la campagne BDS [boycott, désinvestissement, sanction, lire notre enquête ici], et tous les jours nous recevons des menaces, relayées par le site JSSnews et par la ligue de défense juive, qui parle de l’“immonde Stambul”. » Pierre Stambul ne compte pas en rester là, et annonce qu’il portera plainte dans les jours qui suivent contre le comportement de la police, de même que l’UJFP. Pierre Stambul devait participer ce mardi soir à une réunion à Toulouse, organisée par l’UJFP et le comité Boycott, désinvestissement, sanctions (BDS) pour dénoncer l’occupation par Israël de la Cisjordanie.

« Dans la nuit, le commissariat du 9e arrondissement de Marseille, je crois, a reçu un appel d’un dénommé Pierre Stambul affirmant qu’il venait de tuer sa femme, explique de son côté Laurent Nunez, le préfet de police de Marseille. Il a laissé ses coordonnées. Les policiers ont procédé à un contre-appel au numéro indiqué, et l’homme a répondu en répétant qu’il avait tué sa femme, qu’elle avait un trou dans la tête et qu’il tirerait sur tout le monde. » Selon le préfet, les policiers ont eu recours à l’antenne marseillaise du Raid pour se rendre sur place vers 4h30 du matin. « Ils ont trouvé Pierre Stambul et sa femme vivante et l’ont placé en garde à vue pour dénonciation mensongère, car ils ont cru qu’il était à l’origine de l’appel », poursuit Laurent Nunez. Le militant a été libéré « vers 10h30 ».

Le préfet de police de Marseille indique avoir appelé l’UJFP pour présenter ses excuses pour cette « mauvaise interprétation » des policiers. Il souligne que le canular était « très bien monté », la technique du contre-appel étant « très étonnante ». « Cela ressemble beaucoup au mode opératoire de Grégory Chelli [le vrai nom d’Ulcan - ndlr] et nous avons demandé à M. Stambul de déposer plainte », dit Laurent Nunez.

Grégory Chelli, alias Ulcan, est un hacker franco-israélien déjà visé par plus d’une demi-douzaine de procédures pour des faits assez graves. Fin octobre 2014, le hacker a été arrêté et placé en garde à vue, puis relâché après 48 heures d’interrogatoire par les policiers d’Ashdod (Israël), où il réside. L’ambassade d’Israël en France venait de publier un communiqué assurantaux autorités françaises leur volonté de coopérer dans le traitement judiciaire de cette affaire, même si les deux pays ne disposent d’aucune convention d’extradition.

Adepte des impostures téléphoniques de mauvais goût, Grégory Chelli avait notamment fait croire aux parents d’un journaliste de Rue89 dont un article lui avait déplu que leur fils était mort, au début du mois d’août 2014. Puis dans le même registre, Ulcan s’était ensuite fait passer pour Pierre Haski, cofondateur de Rue89, en faisant croire à la police qu’il venait de tuer sa compagne, et en provoquant – là encore – une intervention policière nocturne et traumatisante au domicile du journaliste. La même chose était arrivée voilà quelques jours au négationniste Robert Faurisson.

Les conséquences graves de ces impostures avaient conduit le ministère de l’intérieur à alerter tous les commissariats, les incitant à la prudence en cas d’appel suspect, en recourant notamment à la procédure du contre-appel. Ce qui n’a manifestement pas suffit ici.


Mais ce n’est pas tout ! Le lendemain....

Pas un, mais deux. Aujourd’hui, Jean-Claude Lefort, député honoraire et président honoraire de l’Association France Palestine Solidarité (AFPS) est arrêté. Sur accusation diffamatoire, la brigade anti criminalité intervient dans la nuit à son domicile.
Hier Pierre Stambul, co-président de l’Union juive française pour la paix (UJFP) : avec l’intervention brutale des agents du Raid dans la nuit du 8 au 9 juin selon les procédures de l’anti-terrorisme, il passait 7 heures en garde à vue.

Mais à quoi joue la police nationale ?

Faut-il y voir les premières dérives annoncées des projets prétendument sécuritaires du gouvernement français ?

L’affaire, en tout cas, est très grave. Et le gouvernement doit s’expliquer.

Ne faut-il pas y voir une volonté d’intimidation de ceux qui, depuis le sol français ou non, soutiennent aveuglément la politique du gouvernement d’extrême droite israélien et s’inquiètent du développement sans précédent du mouvement de solidarité avec le peuple palestinien en France, en Europe et dans le monde ?

Nous ne cèderons pas à ces provocations. Au contraire, elles renforcent notre détermination à défendre le droit.

Nous continuerons de défendre le droit du peuple palestinien à l’autodétermination, dont les gouvernements israéliens successifs s’acharnent à empêcher la mise en œuvre, par l’occupation, la colonisation, le détournement des ressources, le siège de Gaza, les bombardements, l’entrave au retour des réfugiés, la violation permanente du droit international et des droits humains élémentaires. Avec nos camarades palestiniens et israéliens engagés pour le droit et pour une paix juste, nous poursuivrons la campagne de Boycott-Désinvestissement-Sanctions contre la politique israélienne tant que cet Etat violera le droit international dans l’impunité permise par la passivité de nos gouvernements. Oui, la France doit sanctionner la politique israélienne et elle doit reconnaître l’Etat de Palestine. Dans l’intérêt de tous. Nous défendrons aussi le droit lorsqu’il est malmené en France. Non, la solidarité n’est pas un délit, ni une importation du conflit en France. La solidarité est un devoir. C’est le mépris du droit et les lectures prétendument identitaires de ce conflit colonial, au détriment du socle citoyen au fondement de la République, qui risquent, au contraire, de susciter dans nos sociétés les pires dérives.

Une seule réponse à ces provocations : l’élargissement de la solidarité avec le peuple palestinien.

Taoufiq Tahani Président de l’AFPS

la conférence de Pierre Stambul enregistrée par les Amis du Temps des Cerises :
https://www.youtube.com/watch?v=enF72p6ARCE#t=67