Plan d’annexion d’Israël : Nous, les Palestiniens, ne nous laisserons pas intimider

lundi 17 août 2020

Le Dr Mousa Abu Marzook est l’un des fondateurs du Hamas. Premier chef de son bureau politique et ensuite directeur adjoint, il est un membre éminent de sa direction et actuel directeur des affaires internationales. Né à Gaza de parents qui ont été chassés de leur maison à Yibna en 1948, le Dr Marzook a obtenu son doctorat en ingénierie aux États-Unis où il a vécu et travaillé pendant de nombreuses années. Après qu’Israël ait échoué à obtenir son extradition au milieu des années 1990 pour des accusations émergeant de la première Intifada, il est revenu au Moyen-Orient.

Les derniers mots de George Floyd, "Je ne peux pas respirer", ont fait écho aux centaines d’enfants palestiniens qui pleurent chaque année sous les décombres des maisons démolies par l’occupation israélienne, qui cherche à détruire les espoirs et les aspirations de la jeunesse palestinienne.

Plan d’annexion d’Israël : Nous, les Palestiniens, ne nous laisserons pas intimider

JPEG - 36.4 ko Des Palestiniennes protestent contre le plan israélien d’annexion, le 6 juillet 2020, au nord de la Gaza

Le chemin de la résistance au colonialisme incarne la lutte contre toutes les formes d’apartheid. Les deux chemins mènent au même résultat : la liberté. Les graves violations des droits de l’homme dont sont victimes les Palestiniens, et la discrimination raciale perpétrée à leur encontre avec l’approbation des États-Unis, ne sont pas nouvelles dans l’histoire des peuples opprimés.

Il n’y a pas si longtemps, les indigènes sud-africains étaient soumis à des violations similaires à celles que le "deal du siècle" américain prêche comme une juste résolution du conflit au Moyen-Orient. C’est un plan construit sur l’illusion - un plan qui ne porte aucune paix, si ce n’est dans son nom vide, et qui adopte pleinement le récit israélien de violations claires et racistes des droits de l’homme, peut-être même plus brutales que celles de l’Afrique du Sud.

Le plan américain légitime le vol des terres palestiniennes, tue les fondations d’un État palestinien et enferme le peuple palestinien dans des ghettos déconnectés, à l’instar des bantoustans séparés pour les populations noires indigènes d’Afrique du Sud - loin de leurs maisons et villes traditionnelles, et très loin des yeux, loin du cœur. Les bantoustans, que ce soit en Afrique du Sud ou en Palestine, servent de couverture au nettoyage ethnique systématique.

Le "deal du siècle" est une tentative désespérée de marchandage politique de la part d’une administration américaine remarquable non pas par la subtilité de ses connaissances et de ses expériences, mais par son manque total de compréhension de la dynamique et des aspirations légitimes du peuple palestinien.

À la barre se trouve le président Donald Trump, que je mets au défi d’énumérer - sans parler d’expliquer - les contours de l’accord, ou la nuance politique et l’histoire de la lutte palestinienne pour l’autodétermination et la justice.

À ses côtés se trouve un cercle de conseillers incompétents et une famille pas plus instruite ni plus expérimentée que lui dans les questions fondamentales nécessitant une résolution équitable, nécessaire pour qu’un règlement juste et pacifique puisse mettre fin à plus de 70 ans de douleur et d’injustice palestiniennes.

Une indifférence flagrante

Qu’il s’agisse de l’ancien envoyé Jason Greenblatt, avocat spécialisé dans l’immobilier et ancien conseiller juridique en chef de la Trump Organization, de son remplaçant Avi Berkowitz, 31 ans, qui a une expérience dans l’immobilier et les médias, ou de David Friedman, qui a été catapulté du poste d’avocat spécialisé dans les faillites à celui d’ambassadeur des États-Unis en Israël et son plus fidèle supporter, aucun d’entre eux ne s’est engagé à jouer un rôle équitable et indépendant dans la recherche de la paix.

Enfin, il y a le gendre du président, Jared Kushner. Oint comme architecte et pierre angulaire de l’accord de "paix", Kushner, une fois de plus, s’est montré inapte à ce rôle.

Et qu’a fait cette administration pour établir son souci et sa préoccupation pour la santé, la sécurité et les droits fondamentaux du peuple palestinien, ou son engagement à jouer le rôle d’arbitre neutre dans la recherche de la paix, vieille de plusieurs décennies ?

Le monde a vu cette administration mettre de côté, avec une indifférence flagrante, des questions aussi essentielles que le statut de Jérusalem en tant que capitale d’un État palestinien, la reconnaissance de ses frontières uniques, les droits fondamentaux des réfugiés palestiniens dans leur propre pays occupé et dans l’exil imposé de leur diaspora, et l’expansion constante des colonies illégales sur l’ensemble de notre territoire.

La vision américaine est une énorme bévue qui ne vise guère plus qu’à correspondre au récit israélien et à se soumettre à sa base politique d’extrême droite.

Courtiser son électorat

Après avoir vu l’"accord du siècle" rejeté dans tout le Moyen-Orient, Israël, avec la bénédiction des États-Unis, menace maintenant d’annexer illégalement la terre palestinienne dans un effort palpable pour s’attirer les faveurs de son électorat. Les Palestiniens n’accepteront pas cette attaque généralisée contre notre histoire et notre avenir.

Israël a l’intention de s’emparer de quelque 30 % de la Cisjordanie occupée et d’y imposer sa "souveraineté", en violation des accords d’Oslo et du droit international. Cette décision éliminerait la solution des deux États menacée de mort depuis des années.

Elle constitue également une violation flagrante de la Charte des Nations unies, qui interdit le contrôle du territoire d’autrui par la force, et de la quatrième Convention de Genève, qui interdit le déplacement des populations occupées de leurs foyers et l’introduction de colons. Le Conseil de sécurité des Nations unies a réaffirmé à plusieurs reprises l’interdiction de l’accaparement des terres, notamment par la résolution 242.

Bien que les États-Unis aient, pendant des décennies, apporté un soutien financier et politique à l’occupation israélienne, l’annexion prévue est en contradiction directe avec la position de toutes les administrations américaines précédentes, qui considéraient à juste titre ces colonies comme contraires au droit international.

Malgré un parti pris pro-israélien marqué, les administrations précédentes ont eu le bon sens de comprendre que le règlement du conflit israélo-arabe doit être le résultat de négociations entre Palestiniens et Israéliens.

Contrecarrer les projets coloniaux

Pourtant, avec une ignorance aveugle de l’histoire et aucune compassion pour la justice, l’administration Trump croit qu’elle peut mettre fin à la résistance légitime et ininterrompue des Palestiniens par le diktat unilatéral et la force d’Israël. Comme tant d’autres faux pas étrangers de Trump, cela continuera à pousser la région vers des tensions de plus en plus fortes, voire vers une véritable explosion.

En tant que Palestiniens, nous ne renoncerons pas. Nous continuerons notre lutte en utilisant toutes les options à notre disposition jusqu’à ce que les plans d’annexion d’Israël - et tous les projets coloniaux qui nous visent - soient contrecarrés. Ce n’est pas seulement notre droit incontestable, mais notre obligation collective en tant que fils et filles, parents et gardiens de générations de Palestiniens.

Nous ne sommes pas différents des autres membres de la communauté mondiale qui peuvent légalement résister à un étranger qui vient chez eux pour tuer leurs enfants ou les déplacer par la force illégale. Quelqu’un abandonnerait-il volontairement sa maison à un individu qui chercherait à la voler ? Je ne le pense pas, car nous sommes tous des êtres humains libres et autonomes.

JPEG - 10.1 ko Mousa Abu Marzook

Source : Middle East Eye
Traduction : MR pour ISM