Rencontre avec la femme qui fusionne le traditionnel obi japonais avec le tatriz palestinien

dimanche 8 août 2021

La créatrice Maki Yamamoto s’est donné pour mission d’établir une relation spéciale entre les deux cultures

JPEG - 309.8 ko Maki Yamamoto et les femmes du camp de réfugiés d’al-Amari en Cisjordanie ont créé la ceinture (obi) de cette tenue qui représente la Palestine au « Imagine One World Kimono Project » (Palestinian Embroidery Obi Project)

Maki Yamamoto a passé les huit dernières années à tenter de changer l’image des Palestiniens dans son pays natal, le Japon.

Son arme de prédilection est le Palestinian Embroidery Obi Project, qui fusionne le traditionnel obi japonais, large bande de tissu qui cercle la taille pour maintenir le kimono, et la broderie palestinienne, appelée tatriz.

Ce projet est issu d’une collaboration entre la créatrice japonaise et des Palestiniennes qui vivent dans les camps de réfugiés en Cisjordanie occupée et dans la bande de Gaza, lesquelles brodent les obis à la main.

Si personne ne souhaite révéler le montant des rémunérations, Maki Yamamoto assure qu’« elles obtiennent le prix qu’elles demandent. C’est un échange parfaitement équitable. »

En ce qui concerne le processus de fabrication des tenues, « tout dépend du design », précise-t-elle.

« Il faut parfois jusqu’à cinq mois pour broder un obi totalement couvert de tatriz. Si le tatriz est petit, la broderie prend un mois environ. Une fois le tatriz terminé, le tissu est amené au Japon où un tailleur de kimono japonais achève le vêtement et crée l’obi. »

« Soutien au peuple palestinien »

Maki Yamamoto a mis le projet sur pied après avoir voyagé en Palestine en 2013 dans le cadre d’un échange culturel organisé par l’Autorité palestinienne.

« J’ai des amis palestiniens qui vivent au Japon et on se connaît depuis plus de quinze ans, alors je savais que les Palestiniens ont de beaux vêtements et de belles broderies.

« Mais c’est après ma première visite que j’ai décidé de soutenir le peuple palestinien. »

Yamamoto, qui est également pharmacologue, confie qu’on compatit énormément à la détresse des Palestiniens au Japon – du moins par rapport aux pays occidentaux.

Le gouvernement japonais soutient officiellement la solution à deux États le long des frontières de 1967, réclame une résolution « juste » au problème des réfugiés palestiniens et s’oppose à l’annexion unilatérale par Israël de Jérusalem-Est occupée. Selon Yamamoto, les médias japonais penchent également en faveur des Palestiniens.

Mohamed Shokeir, journaliste qui écrit pour The Arab, digest trimestriel sur les relations arabo-nippones, explique : « Shinzo Abe [l’ancien Premier ministre japonais] était généralement du côté des Palestiniens et non des Israéliens.

Les Palestiniens sont vus comme faibles et privés de leurs terres par un peuple plus puissant et mieux armé. Donc les Japonais sont plus ouverts et plus accueillants envers les Palestiniens. »
Maki Yamamoto (à droite) est la fondatrice du Palestinian Embroidery Obi Project et a réalisé plus de dix-sept voyages à Hébron et ailleurs dans les territoires occupés depuis 2013 (crédit : Kotaro Manabe)
Maki Yamamoto est la fondatrice du Palestinian Embroidery Obi Project et a réalisé plus de dix-sept voyages à Hébron et ailleurs dans les territoires occupés depuis 2013 (crédit : Kotaro Manabe)

Mais outre la sympathie que suscite la cause palestinienne au Japon, c’est la visite de Yamamoto dans les territoires occupés et son expérience de la « résilience » et de la « cordiale hospitalité » du peuple palestinien qui lui ont donné l’envie d’agir.

Son doctorat à l’Université d’agriculture et de technologie de Tokyo, qu’elle a commencé après sa visite en 2020, se concentre sur la broderie palestinienne et l’indépendance économique des agricultrices et réfugiées palestiniennes.

Elle dit vouloir « mettre en lumière de façon positive » la Palestine et la population arabe en général.

« Il s’agit de droits de l’homme fondamentaux », estime-t-elle. « Les Palestiniens qui vivent dans certaines régions de Cisjordanie sont encerclés par les colonies israéliennes illégales, et il y a le blocus de Gaza. Ils ne peuvent travailler librement, ils ne peuvent vivre librement.

« Le peuple palestinien, les réfugiés palestiniens, sont dans une situation difficile, mais cela ne se résume pas à cela. Les artisans qui font de la broderie dans les camps de réfugiés créent des choses magnifiques malgré les conditions de vie difficiles. Je voulais montrer au Japon la beauté et la résilience de la Palestine. »

Le tatriz en tant qu’identité

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