Une route dangereuse vers l’éducation : sommaire du 1er semestre de l’année scolaire 2016-2017

samedi 11 mars 2017

Les enfants des villages palestiniens de Tuba et Maghayir Al-Abeed ont commencé le premier semestre de l’année scolaire 2016-17 avec des soldats israéliens les escortant jusqu’à leur école dans le village voisin d’At-Tuwani. C’est la treizième année consécutive que ces enfants ont besoin d’une escorte militaire pour se rendre à l’école sans dommage.

Pour aller à l’école, les enfants doivent marcher le long d’une route qui autrefois permettait un voyage aisé entre les villages, mais qui passe aujourd’hui entre la colonie israélienne de Ma’on et l’avant-poste illégal de Havat Ma’on. Au cours des treize années passées, le comportement violent des colons de l’avant-poste, dont l’existence est illégale au regard du droit israélien comme du droit international, a rendu la route impraticable pour les Palestiniens. Même escortés par des soldats israéliens, les écoliers continuent d’être exposés à de possibles violences, harcèlements et intimidations alors qu’ils se rendent à l’école ou en reviennent.
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Au cours du premier semestre de l’année scolaire 2016-2017, c’est en moyenne huit enfants, entre six et seize ans, qui ont été accompagnés par une escorte militaire pour aller et revenir de l’école du village palestinien d’At-Tuwani. Placée sous l’autorité du Comité des droits de l’enfant de la Knesset israélienne, l’escorte militaire est chargée de protéger ces enfants contre la violence et l’intimidation des colons tout au long de leur trajet, vers l’école le matin et lors de leur retour à la maison l’après-midi.

Les volontaires internationaux de l’Opération Dove ont documenté de multiples cas où l’escorte militaire n’a pas assuré la protection des enfants, les laissant vulnérables devant la violence des colons à de nombreuses reprises, durant le premier semestre de l’année scolaire 2016-2017.
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Les retards de l’escorte militaire

Même avec une escorte militaire, le trajet entre la maison et l’école reste difficile pour les enfants de Tuba et Maghyir al Abeed. Durant le premier semestre scolaire 2016-17, l’escorte est arrivée 23 fois en retard (le matin) sur un total de 88 jours d’école observés. De ce fait, les enfants ont manqué un total de 7 heures d’écoles (441 minutes).

Les volontaires de l’Opération Dove ont signalé une fréquence plus importante encore d’arrivées en retard de l’escorte dans l’après-midi, obligeant les enfants à rentrer chez eux tardivement et de passer leur temps libre en attente. Sur 88 jours d’école, 33 jours (87 %) les enfants ont été forcés d’attendre à At-Tuwani, après la classe, l’arrivée de l’escorte. Au cours du premier semestre, ils ont eu à attendre plus de 27 heures (1630 minutes).

Les lieux de rendez-vous avec l’escorte militaire, tant pour le trajet du matin que pour celui de l’après-midi, sont très proches de l’avant-poste illégal de Havat Ma’on, et par conséquent, quand l’escorte est en retard, les enfants sont obliger d’attendre là où ils sont exposés à la violence et au harcèlement des colons. Durant le premier semestre 2016-17, les enfants ont attendu l’escorte à ces endroits dangereux pendant un total de 35 heures.

Les absences de l’escorte militaire

Durant le premier semestre, l’escorte militaire ne s’est pas présentée à quatre occasions, une fois le matin et trois fois l’après-midi. Ces incidents constituent des manquements extrêmement graves de la part de l’escorte dans la protection adéquate des enfants. Les enfants ne peuvent utiliser la route sans la présence des soldats en raison des risques d’agressions par les colons. Les années précédentes, quand l’escorte n’est pas venue, les enfants ont dû emprunter un sentier qui longe la limite de l’avant-poste illégal de Havat Ma’on. Mais les colons de cet avant-poste ont construit maintenant une nouvelle structure à proximité du chemin, rendant celui-ci quasiment impraticable. Avec la présence de cette structure et un niveau accru de la violence et de l’intimidation des colons contre les Palestiniens qui utilisent ce chemin, celui-ci est devenu trop dangereux pour les enfants et par conséquent, ils doivent désormais emprunter un chemin plus long entre l’école et leur domicile si les soldats ne viennent pas. Ce chemin plus long demande entre 45 minutes et une heure et il est extrêmement difficile, surtout pour les plus jeunes enfants. Et même avec ce chemin plus long, les enfants restent exposés à la violence et au harcèlement des colons. Durant le premier semestre, les enfants ont utilisé ce chemin plus long trois fois sur les quatre fois où l’escorte à manquer de les retrouver.

Dans l’un des cas, l’escorte n’avait pas retrouvé les enfants après l’école parce que, selon les soldats, ils ne connaissaient pas l’endroit du point de rencontre, un endroit inchangé depuis 13 ans. Les écoliers ont commencé à s’engager sur ce plus long trajet, bien qu’il soit aussi dangereux pour eux dans le cas où ils ne sont pas accompagnés. Ils ont retrouvé les soldats plus loin sur la route et sont arrivés au village de Tuba sans dommage, escortés par les soldats israéliens après une forte pression de la part des volontaires de l’Opération Dove.

Dans les quatre cas, les soldats israéliens n’ont donné aucune explication plausible pour leur incapacité à rencontrer les enfants, que ce soit aux volontaires de l’Opération Dove ou aux enfants eux-mêmes.

L’inconduite de l’escorte militaire

Même quand l’escorte militaire arrive, les soldats souvent n’apportent pas une protection adéquate des enfants.
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Contrevenant à l’accord conclu entre l’Administration civile israélienne (DCO) et le maire d’At-Tuwani, les soldats israéliens souvent ne marchent pas avec les enfants durant l’escorte, même quand les volontaires internationaux de l’Opération Dove le leur demandent. Dans 52 % des trajets faits par les enfants avec l’escorte durant ce semestre (soit 90 trajets sur les 173 au total), les soldats sont restés dans leur jeep et n’ont pas marché aux côtés des enfants alors que ceux-ci passaient entre la colonie et l’avant-poste illégal.

Les soldats chargés d’escorter les enfants sont également fréquemment incapables d’achever l’escorte, forçant les enfants à les retrouver plus près de l’avant-poste que le point de rencontre convenu, ou les abandonnant avant qu’ils n’aient fini leur trajet. Cela contraint les enfants à parcourir la portion de leur trajet proche de l’avant-poste illégal sans être protégés. Dans 73 % des trajets faits par les enfants avec l’escorte durant ce semestre, (soit 127 trajets sur 173), les soldats ont manqué à leur obligation d’escorter les enfants sur toute la distance convenue.

Les volontaires internationaux de l’Opération Dove ont également signalé d’autres manquements extrêmement sérieux par l’escorte militaire durant le premier semestre : le 27 octobre, les soldats qui escortaient les enfants ont lancé des pierres sur les écoliers qu’ils sont chargés de protéger, et ils portaient un lance-pierres, alors qu’il est illégal d’en utiliser un ou d’en posséder.

Quand l’escorte militaire n’arrive pas à temps, quand les soldats ne marchent pas avec les enfants, et quand l’escorte n’accompagne pas les enfants tout au long du trajet, non seulement les soldats faillissent à leur obligation de protéger les enfants, mais ils mettent en réalité ces enfants qu’ils sont chargés de protéger dans des situations dangereuses.

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La violence des colons

À trois reprises au cours du premier semestre de l’année scolaire 2016-17, les colons ont usé de violence contre les enfants durant leur trajet à destination ou en provenance de l’école.

À deux occasions, les colons les ont harcelés et menacés dans des cas où l’escorte militaire n’était pas venue et où les enfants avaient donc été obligés de marcher sans l’escorte. Dans trois cas, les colons ont également harcelé et menacé les volontaires de l’Opération Dove, alors que ceux-ci surveillaient le déroulement de l’escorte militaire des écoliers.

Durant le premier semestre, il n’y a eu aucun cas de violence de colons sur la route quand les écoliers marchaient avec l’escorte, mais les colons ont harcelé et menacé les écoliers alors que l’escorte n’était pas venue et que les enfants avaient été contraints d’emprunter le plus long trajet.

Par conséquent, le droit des enfants à la liberté de mouvement leur est doublement refusé : ils ne peuvent pas emprunter en sécurité la route la plus directe pour leur école sans la présence des soldats israéliens pour les protéger, et si les soldats ne viennent pas, les enfants sont incapables d’utiliser l’alternative du sentier, à cause de la présence des colons qui les menacent, les harcèlent et tentent de les intimider, et bloquent le sentier avec leur structure illégale.

Des étudiants de l’université

En septembre 2016, deux garçons ayant l’âge pour l’enseignement supérieur, du village palestinien de Tuba, ont commencé à fréquenter l’université de la ville palestinienne d’Hébron. La route la plus courte pour l’université est la même que celle utilisée par les écoliers pour arriver à leur école d’At-Tuwani.

Souvent l’horaire de l’université est différent de celui de l’école d’At-Tuwani, ce qui contraint les étudiants universitaires de Tuba à prendre un sentier plus long, de l’école à leur domicile, sans escorte militaire. Au cours de ce premier semestre, ces deux étudiants de l’université ont été harcelés, attaqués et pourchassés par les colons de l’avant-poste illégal de Havat Ma’on, à six reprises sur le plus long trajet.

Même quand leur horaire de l’université leur permet de marcher avec l’escorte militaire, leur droit à la liberté de mouvement n’est pas assuré.

Le 6 décembre, deux soldats israéliens qui escortaient les écoliers fréquentant l’école d’At-Tuwani ont refusé d’escorter en plus un garçon palestinien revenant de l’université d’Hébron vers sa maison dans le village palestinien de Tuba. Les soldats ne voulaient pas expliquer leur refus à l’étudiant, aux volontaires de l’Opération Dove, et à l’avocat de l’étudiant. Mais après une demi-heure, les soldats ont accepté d’escorter l’étudiant universitaire avec le reste des écoliers et à mi-chemin, ils ont arrêté tout le groupe pour contrôler l’identité de l’universitaire une fois encore, obligeant tout le groupe à attendre pendant un quart d’heure dans un endroit dangereux, très proche de l’avant-poste israélien illégal de Havat Ma’on.

La violence des colons et les manquements de l’escorte militaire israélienne se combinent pour dénier aux étudiants de Tuba et de Maghayir al Abeed leur droit fondamental à la liberté de mouvement et à l’éducation, en violation particulièrement de l’article 2-19-28-38 de la Convention relative aux Droits de l’enfant (CRC).

Considérant le contexte général exposé ci-dessus, l’Opération Dove dénonce la négligence de l’armée israélienne durant l’escorte, et condamne la violence des colons israéliens contre les enfants et les volontaires internationaux. Soulignant les données recueilles, il est clair que la présence de l’escorte militaire ne constitue pas une solution permanente et efficace pour la protection des étudiants des villages palestiniens voisins, ni un moyen de dissuasion contre la violence des colons. Cette forme de protection nécessite un véritable réexamen, une action qui devrait impliquer l’ensemble des réalités locales qui souffrent de l’occupation israélienne.

source : Les volontaires internationaux de l’Opération Dove
Traduction JPP pour l’AURDIP (Association des Universitaires pour le Respect du Droit International en Palestine)


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