Abbas annonce d’improbables élections palestiniennes

dimanche 7 février 2021

Par Amira Hass

Le processus pourrait relancer le système politique palestinien, à condition qu’Israël n’emprisonne pas les candidats.

Le décret du « président » palestinien Mahmoud Abbas annonçant des élections parlementaires et présidentielles pour l’Autorité palestinienne respectivement en mai et juillet – 14 et 15 ans après les précédentes, qui étaient toutes deux supposées être pour une durée de quatre années – a été généralement bien accueilli.

Et pour cause : malgré la division et la ségrégation dictées par Israël, les forces politiques palestiniennes et les organismes tels que la Commission électorale centrale palestinienne continuent de s’adresser à la population palestinienne de la bande de Gaza et de la Cisjordanie, y compris Jérusalem-Est, en tant qu’entité unique ayant des intérêts communs qui doivent être exprimés – y compris par des élections.

Pendant des années, le Hamas et le Fatah ont préféré ne pas organiser d’élections générales, chacun pour ses propres raisons, tout en disant officiellement le contraire.

JPEG - 71.8 ko Rassemblement du mouvement Hamas à Gaza - Photo : via Hamas.ps

Les représentants des pays donateurs ont caché leur embarras face à la paralysie du processus démocratique formel de leur protégé, l’Autorité palestinienne, mais les Palestiniens ne se sont jamais faits à la réalité de l’absence d’élections. Dans un sondage réalisé en décembre, environ 75 % des personnes interrogées ont déclaré que ces élections devraient être organisées.

La position du public palestinien, des organisations de défense des droits de l’homme et des petits partis politiques l’a emporté sur la commodité d’un pouvoir permanent – et dans la division – de deux organisations. Cela aussi doit être salué.

Mais bientôt, les congratulations laisseront place aux doutes : certaines des raisons pour lesquelles les tentatives d’organiser des élections ont échoué au cours des dix dernières années n’ont pas été éliminées, loin s’en faut, et la pandémie du coronavirus a ajouté de nouveaux obstacles.

L’inscription des nouveaux électeurs ainsi que la liste des candidats de chaque parti se feront par voie électronique, mais le vote lui-même se fera en présentiel, dans les bureaux de vote.

Si les taux d’infection, de maladies graves et de décès ne diminuent pas sensiblement avant mai, la pandémie pourrait servir de prétexte supplémentaire pour reporter les élections – surtout si le Fatah devait découvrir, à la veille du scrutin, qu’il risque de prendre un nouveau coup de massue sur la tête parce que les accusations de corruption et de népotisme sont toujours là.

Cela, en plus des mauvaises notes obtenues par le Fatah et Abbas suite à leurs échecs.

Dans ce sondage d’opinion de décembre, qui a été mené par le Centre palestinien pour la politique et la recherche en Cisjordanie et dans la bande de Gaza, 66 % des personnes interrogées ont déclaré qu’Abbas devrait démissionner.

Lorsqu’on a demandé aux sondés comment ils voteraient si l’élection présidentielle avait lieu le jour du sondage, 43 % ont répondu Abbas et 50 % ont répondu qu’ils voteraient pour Ismail Haniyeh, le responsable de l’aile politique du Hamas. De tous les hauts responsables du Fatah, seul Marwan Barghouti, qui purge une peine de prison à vie dans une prison israélienne, pourrait battre Haniyeh aux élections.

Mais pour le présenter comme candidat à la présidence, le mouvement totalement ossifié du Fatah devrait faire preuve de la créativité et de la flexibilité qu’il a perdues depuis longtemps.

Si l’élection du Conseil législatif palestinien a lieu en mai, et si le Fatah n’est pas satisfait des résultats, le mouvement trouvera très probablement un prétexte pour reporter l’élection présidentielle prévue en juillet.

Les responsables du Fatah sont tellement déconnectés des électeurs qu’ils ne peuvent imaginer une défaite.

Le sondage a donné au Fatah un léger avantage sur le Hamas lors des élections législatives (38% contre 34%), mais étant donné les disputes et les divisions au sein du Fatah, il est probable qu’avant les élections, au moins une liste de plus sera formée par les loyalistes du Fatah qui ont été tenus à l’écart des positions de pouvoir, comme les partisans de Mohammed Dahlan et de Barghouti.

Il serait surprenant que le Fatah surmonte, en moins de cinq mois, tous les désaccords et rivalités internes entre ses hauts responsables – dont aucun n’est populaire auprès des Palestiniens – et parvienne à se présenter avec un seul et même ticket – le 1er mai étant la date limite pour la présentation des listes.

D’autre part, il est très probable que les électeurs palestiniens se souviendront de la leçon de 2006 : lorsqu’ils ont sanctionné le Fatah dans les urnes, préférant les candidats du Hamas dans une élection juste et transparente, Israël et le monde ont puni les électeurs en bloquant le transfert des frais de douane et des donations.

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