« Israël »… colonie européenne implantée en Palestine

samedi 13 novembre 2021

par Hadar Cohen.

Le sionisme n’a pas de place pour une juive arabe comme moi.

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L’État d’Israël nous a conditionnés à voir comme impossible l’intersection de « juif » et « arabe » – alors même que ma famille maintient cette identité depuis des générations.

À chaque fois que je me retrouve dans une manifestation de gauche contre l’occupation, il y a toujours quelqu’un tenant une pancarte qui dit : « Les juifs et les Arabes refusent d’être ennemis ».

Cette phrase est devenue, d’une certaine façon, le socle de l’idéologie de gauche promouvant la coexistence en Israël/Palestine. Mais quand je vois cette phrase, je me sens immédiatement désorientée. De quel côté suis-je ?

Si je suis sur le côté juif, est-ce que je perds l’identité arabe à l’intérieur de moi ? Est-ce que je peux m’identifier comme une Arabe, alors même que je jouis des privilèges d’une citoyenne juive israélienne ? Qui a décidé d’opposer une ethnie à une religion ?

La colonisation agit sur nos esprits pour déformer notre compréhension de l’identité et perpétuer son agenda propre. À cause de cela, mon identité a été une grande source de confusion interne, qu’il m’a pris des années à déballer et à démêler.

Récemment, j’ai commencé à comprendre comment ce dialogue interne avec moi-même représente un dilemne politique né dans la colonisation de la Palestine.

Je m’identifie comme juive arabe. Ma famille a vécu à Jérusalem pendant plus de 10 générations et les autres cités de mes ancêtres incluent Alep en Syrie, Baghdad en Iraq et Shiraz en Iran, ainsi qu’un petit village dans le Kurdistan.

J’ai grandi dans des traditions et des cultures principalement syro-palestiniennes. Ma grand-mère était une peintre féministe, passionnée de cinéma et de littérature. Mon grand-père était un imam, expert dans l’art du maqamat, un cadre mélodique arabe unique, et qui récitait les prières dans la tradition syro-hiérosolymitaine.

Ma famille priait en hébreu et en arabe, avec un fort accent qui roulait sur nos langues quand nous prononcions les bénédictions juives. J’ai grandi avec [le chanteur arabe] Mohamed Abdel Wahab et avec les piyyouts du Shabbat, les poèmes liturgiques juifs, chantés ensemble. Jusqu’à la génération de mes parents, l’arabe était le langage dominant dans ma famille.

Dans notre foyer juif traditionnel, observer notre héritage et notre culture syro-palestiniens se faisait facilement. La judéité et l’arabité s’accordaient parfaitement – il n’y avait pas de contradiction. Mais hors de notre maison, ma religion et ma culture étaient en conflit.

L’État d’Israël m’a conditionnée à voir l’intersection de « juive » et « arabe » comme non-existante, ou impossible, même alors que les juifs arabes ont vécu pendant des années à cette intersection. J’ai appris que pour appartenir à la société israélienne et participer au projet sioniste, j’avais à rejeter des parties de moi-même – les parties arabes.

Le sionisme enseigne que les « Arabes » sont les ennemis des juifs, et ce faisant, il a complètement fragmenté mon identité. Ces subtils changements se sont accumulés graduellement pour subvertir mon identité originelle. Cela a créé une dissonance entre la réalité que je vivais intérieurement et le narratif attendu du projet colonial, à l’extérieur.

Je me retrouve constamment à devoir choisir entre ma judéité et mon arabité. Est-ce que je fais partie de la vaste communauté juive, étant donné que je suis sa foi et ses coutumes ? Ou est-ce que j’appartiens à la communauté arabe, dont les traditions culturelles et les styles de vie sont plus en résonance avec les miennes ?

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