Une lettre de Jean-Jacques Pérennès o.p., directeur de l’Ecole Biblique à Jérusalem.

dimanche 16 janvier 2022

JPEG - 262.4 ko Entrée du couvent St Étienne et de l’École Biblique et Archéologique Française à Jérusalem

À Jérusalem et en Palestine, une paix qui s’éloigne

Chers amis, je terminais la lettre de l’an dernier en disant mon scepticisme sur les “Accords d’Abraham” bricolés par l’administration Trump pour retisser des liens entre Israël et ses voisins arabes, sans impliquer nullement les Palestiniens. Au risque de vous lasser, je dois commencer par un mot sur le contexte dans lequel je vis et qui ne s’est arrangé en rien. Israël est, en effet, parvenu à renouer des relations économiques et parfois politiques avec plusieurs pays arabes, en particulier les Émirats arabes unis et le Maroc. Dans le premier cas, l’objectif est d’attirer en Israël des investissements massifs nécessaires à un pays qui dépense énormément dans la recherche, les startups, les infrastructures ; dans le cas marocain, il s’agit davantage de faciliter les contacts humains pour l’importante communauté juive sépharade d’origine marocaine. Ceci n’a en rien contribué à la paix, Israël ayant poursuivi cette année sa politique de purification ethnique en essayant d’exproprier le maximum de Palestiniens de la Vieille ville de Jérusalem et de certains quartiers de Jérusalem-Est.

Nous avons été aux premières loges des affrontements qui ont eu lieu autour de ces projets d’expropriation puisque le quartier de Sheikh Jarrah dont la presse internationale a beaucoup parlé est à un bout de notre rue de Naplouse, et la Porte de Damas, lieu d’affrontement de la jeunesse palestinienne avec les soldats israéliens, est à l’autre bout de la rue, environ 100 mètres de chaque côté. Ces expropriations sont un dossier complexe : au moment de la Partition de la Palestine en 1948, les Palestiniens vivant à l’ouest de la ville ont perdu leur logement et se sont réfugiés à l’est ou ont quitté le pays. Les citoyens juifs de l’est de la ville sont eux passés de l’autre côté de la ligne de démarcation. Ce sont ceux-là qui demandent et se voient reconnaître aujourd’hui le droit de récupérer leur propriété. La difficulté est que ça ne marche pas dans l’autre sens et que des trusts israéliens basés aux USA s’en sont mêlés. D’où les procès et les affrontements inévitables après des décisions de justice jugées inacceptables. Le gouvernement prétend qu’il s’agit de questions privées et dit ne pas vouloir s’en mêler. En réalité, laisser pourrir la situation sert une politique de fond, pratiquée aussi à plus grande échelle dans le quartier arabe de Silwan, proche de la Cité de David : vider progressivement Jérusalem de sa population palestinienne et judaïser la ville. On trouvera un dossier très documenté et nuancé sur le sujet dans The Times of Israël du 3 octobre 2021.

Nous avons donc été les témoins tous les soirs de mai et parfois de juin d’affrontements violents sous nos fenêtres : grenades assourdissantes, jets d’eau pestilentielle pour disperser les manifestants, charges de la police montée à cheval. Aucun danger pour nous, mais ce furent des semaines nerveusement usantes. Heureusement, l’absence d’étudiants l’an dernier faisait qu’au moins nous n’avions pas à gérer le stress de jeunes que cette violence traumatise. Mais nous aussi, cela nous use à la longue. Vivre ici est une épreuve morale de chaque jour.

Enfin des étudiants

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