"Freedom is the Future", une nouvelle plateforme lancée par des organisations palestiniennes basées aux Etats-Unis et soutenue par une coalition de groupes de défense des droits humains, cherche à peser dans le débat des élections présidentielles de 2020.
Alors que l’élection présidentielle de 2020 s’annonce et que la campagne a commencé, des organisations palestiniennes aux Etats-Unis ont lancé une plateforme politique unique en son genredans le but de faire des droits des Palestiniens un sujet du débat politique américain.
Inspirée par des expériences comme celle du mouvement Black Lives, la plateforme "Freedom is the Future", lancée conjointement par l’U.S. Campaign for Palestinian Rights et Adalah Justice Project, est articulée autour d’une question centrale : en finir avec le soutien économique et diplomatique américain à Israël aussi longtemps que continuera le déni des droits palestiniens.
Au-delà de cette demande, la plateforme affiche cinq autres requêtes :
* le droit au retour des réfugiés ;
* l’auto-détermination ;
* la liberté de mouvement pour tous les Palestiniens ;
* la fin de la violence israélienne
* et le droit à s’organiser contre le répression menée par l’Etat d’Israël.
Avec le débat sur Israël qui continue de faire les grands titres alors que commence la saison de la primaire démocrate, la plateforme vise à ancrer cette discussion plus à gauche et à permettre aux Palestiniens, dont on parle souvent, d’être aussi écoutés.
« Ca fait si longtemps qu’on parle de la Palestine et des Palestiniens sans eux », explique Sandra Tamari, la directrice exécutive de Adalah Justice Project, une organisation de défense des droits des Palestiniens, soeur jumelle de celle de Haïfa.
Nous envisageons cette vision et ces demandes comme des correctifs à au statu quo qui veut que les Palestiniens restent exclus des conversations sur leur avenir.
La plateforme a été conçue grâce à l’impulsion de Palestiniens qui vivent en Israël-Palestine et des membres du groupe de jeunesse populaire Palestinian Youth Movement. Tous espèrent que d’autres organisations y trouveront des indications pour, à leur tour, pouvoir porter un discours sur les droits des Palestiniens aux Etats-Unis.
Le projet est soutenu par 14 organisations palestiniennes indépendantes, mais aussi par une vingtaine d’autres collectifs de solidarité ou de représentation des minorités de couleurs aux Etats-Unis : The Ramapough Lenape Nation, une tribu indigène, MPower Change, un groupe musulman-américain, les Dream Defenders, un groupe de défense des droits civiques des minorités de couleur noire, The Red Nation, une coalition de militants indigènes et About Face, un groupe antimilitariste de vétérans.
L’engagement de ces organisations est la preuve du succès remporté par les initiateurs palestiniens dans leur volonté de relier les luttes.
Depuis sa création en 2017, une des stratégies principales d’Adalah Justice Project est de "dé-exceptionnaliser" la Palestine en soulignant la similitude entre les systèmes d’oppression qui opèrent tant en Israël-Palestine qu’aux Etats-Unis et en établissant des liens avec d’autres organisations américaines qui travaillent sur les droits des Palestiniens comme une partie de leur lutte pour la libération de l’oppression.
« Une vision courageuse de l’avenir fondée sur la justice exige des luttes courageuses pour articuler notre demande », explique Nick Estes, membre de The Red Nation, dans une déclaration publiée par "Freedom is the Future". « En tant que peuple indigène de ce continent, nous comprenons que cela commence et que cela finit par la décolonisation de Turtle Island et de la Palestine. » (Turtle Island est le nom indien pour les terres sur lesquels l’Amérique du nord a été installée).
La plateforme s’inspire aussi de la stratégie "invest-divest" du mouvement Black Lives qui appelle à investir dans les communautés noires et à céder sur les prisons. S’en inspirant, la plateforme "Freedom is the Future" appelle le gouvernement américain à céder sur son soutien militaire à Israël et à investir dans la santé pour tous, dans l’éducation et dans l’environnement.
"Freedom is the Future" voit le jour alors que les candidates démocrates à la présidentielle discutent de l’opportunité d’imposer des conditions humanitaires à l’assistance militaire américaine à Israël - une position soutenue par Bernie Sanders mais que Joe Biden estime « étrange » - et après que IfNotNow, le groupe de Juifs américains contre l’occupation, a lancé son propre programme de "dé-financement" de l’occupation.
Pourtant, il existe certaines différences entre ses discussions politiques et ce que "Freedom is the Future" cherche à faire.
D’une part, la plateforme dirigée par les Palestiniens appelle au droit au retour des réfugiés palestiniens été expulsés en 1948, centrant le débat sur la Nakba, le nettoyage ethnique de la Palestine par Israël, ce que les Palestiniens considèrent comme le coeur du système de discrimination mis en oeuvre par Israël. Un système qui maintient le refus du droit au retour pour garantir l’existence d’un État qui privilégie les Juifs plutôt que les Palestiniens.
Un autre sujet de conversation au sein du Parti démocrate quand il s’agit d’Israël est que la plateforme "Freedom is the Future" ne parle pas simplement de conditionner l’aide américaine ; elle demande d’en finir avec le financement américain et le soutien diplomatique à Israël, une perspective que peu de membres du Parti endosse.
Or les initiateurs de cette démarche poussent au-delà des limites des conversations politiques habituelles, soutenant que la justice requiert qu’on écoute ceux qui subissent le plus la politique israélienne.
Trop souvent la conversation sur la façon dont la politique américaine envisage le processus de paix tourne autour d’organisations qui ne relaient pas directement la voix des Palestiniens et qui reprennent le narratif des sionistes libéraux, explique Youssef Munayyer, le directeur exécutif de l’U.S. Campaign for Palestinian Rights.
Ca fait une grande différence de mettre les voix des Palestiniens au centre du débat. Cela exige une grande responsabilité, dont le but est la liberté et la justice pour tous les peuples et non le maintien d’un système de discrimination.
Source : +972 Magazine
Sur le site AFPS
Traduit de l’anglais (original) par l’AFPS.