Israël-Palestine : vers l’État unique ?
Le 10 juin 1967, au terme de la guerre israélo-arabe dite « des Six-Jours », Israël quadruple son territoire : il s’est emparé du Sinaï égyptien et du Golan syrien, mais surtout du reste de la Palestine : la bande de Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est. Quelques mois plus tard, l’ONU exige le retrait des territoires occupés, en échange d’une paix négociée.
Non seulement Israël refuse, mais il annexe la partie arabe de Jérusalem et y implante des colonies juives en même temps que dans les autres territoires occupés. En cinquante ans, le nombre de colons atteint 220 000 à Jérusalem-Est et 430 000 en Cisjordanie – il n’y en a plus à Gaza depuis 2005. Cette colonisation viole le droit international, car les Conventions de Genève comme l’ONU l’interdisent formellement.
L’État palestinien s’efface sur le terrain
Que faire de ces territoires ? Du côté palestinien, à partir de 1974, l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) se prononce pour la construction d’une « Autorité nationale et combattante sur toute partie du territoire palestinien qui sera libérée ». Cette évolution la conduira, le 15 novembre 1988, à proclamer l’État de Palestine tout en reconnaissant Israël et en renonçant au terrorisme. Ce qu’elle confirmera lors de la signature des accords d’Oslo, en septembre 1993.
Du côté israélien, pas question de reconnaître un État palestinien. Même lors de l’échange de lettres avec Yasser Arafat, Itzhak Rabin reconnaît, non pas cet État, mais l’OLP comme « le représentant du peuple palestinien ». Et les négociations consécutives aux accords d’Oslo ne s’inscriront jamais explicitement dans la perspective de la création d’un État palestinien.
Au fil des décennies, en revanche, la communauté internationale fait sienne de plus en plus largement la solution dite « des deux États ». Le 29 novembre 2012, 136 États – contre 9 et 41 abstentions – admettent l’État de Palestine comme membre observateur de l’ONU. Auparavant, il a été accueilli de plein droit : au sein de l’Unesco en 2011, et en 2015 à la Cour pénale internationale (CPI).
De la colonisation à l’annexion
Hélas, au fur et à mesure que l’État de Palestine s’impose dans l’arène internationale, il s’efface sur le terrain. En ce début 2017, l’extrême droite israélienne engage en effet un tournant dans l’histoire du conflit israélo-palestinien : le passage de la colonisation à l’annexion. À l’initiative de Naftali Bennet, le leader du parti ultranationaliste Foyer juif, le Parlement vote, le 6 février 2017, celle de 4 000 logements dans des « avant-postes », ces colonies que même le droit israélien jugeait jusqu’ici illégal.
Enivré par l’élection de Donald Trump et enhardi par les scandales qui « plombent » le premier ministre Benyamin Nétanyahou, Naftali Bennet ne dissimule plus ses ambitions. Après le démantèlement de l’« avant-poste » d’Amona, il avait déclaré :
" Nous mettrons en place un nouveau régime juridique en Judée et en Samarie (appellation israélienne de la Cisjordanie) qui régulera la totalité des implantations, et de la perte douloureuse de ce bastion dans la montagne émergera l’application de la souveraineté d’Israël sur toute la Cisjordanie "(Times of Israel, 1er février 2017).
L’apartheid version israélienne
Mais quel sera le statut des Palestiniens ainsi annexés avec leur terre ? Pour le président de l’État d’Israël, Reuven Rivlin, la réponse est claire :
" Appliquer la souveraineté à une zone donne la citoyenneté à ceux qui y vivent. Il n’y a pas de loi [différente] pour les Israéliens et pour les non Israéliens". (Times of Israel, 14 février 2017)
Mais le président est isolé : la plupart des dirigeants israéliens excluent d’accorder aux Arabes de Cisjordanie le droit de vote dont jouissent les juifs (et, en Israël même, les Palestiniens). Autrement dit, ils envisagent une version israélienne de l’apartheid sud-africain.
C’est dire que l’État unique qui se profile n’a rien de commun avec la Palestine laïque et démocratique que prônait l’OLP à ses débuts ni avec la Fédération judéo-arabe rêvé par les binationalistes juifs en Palestine dans les années 1930. La communauté internationale ne saurait l’accepter.
Le 10 juin 1967, au terme de la guerre israélo-arabe dite « des Six-Jours », Israël quadruple son territoire : il s’est emparé du Sinaï égyptien et du Golan syrien, mais surtout du reste de la Palestine : la bande de Gaza, la Cisjordanie et Jérusalem-Est. Quelques mois plus tard, l’ONU exige le retrait des territoires occupés, en échange d’une paix négociée.
Non seulement Israël refuse, mais il annexe la partie arabe de Jérusalem et y implante des colonies juives en même temps que dans les autres territoires occupés. En cinquante ans, le nombre de colons atteint 220 000 à Jérusalem-Est et 430 000 en Cisjordanie – il n’y en a plus à Gaza depuis 2005. Cette colonisation viole le droit international, car les Conventions de Genève comme l’ONU l’interdisent formellement.
L’État palestinien s’efface sur le terrain
Que faire de ces territoires ? Du côté palestinien, à partir de 1974, l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) se prononce pour la construction d’une « Autorité nationale et combattante sur toute partie du territoire palestinien qui sera libérée ». Cette évolution la conduira, le 15 novembre 1988, à proclamer l’État de Palestine tout en reconnaissant Israël et en renonçant au terrorisme. Ce qu’elle confirmera lors de la signature des accords d’Oslo, en septembre 1993.
Du côté israélien, pas question de reconnaître un État palestinien. Même lors de l’échange de lettres avec Yasser Arafat, Itzhak Rabin reconnaît, non pas cet État, mais l’OLP comme « le représentant du peuple palestinien ». Et les négociations consécutives aux accords d’Oslo ne s’inscriront jamais explicitement dans la perspective de la création d’un État palestinien.
Au fil des décennies, en revanche, la communauté internationale fait sienne de plus en plus largement la solution dite « des deux États ». Le 29 novembre 2012, 136 États – contre 9 et 41 abstentions – admettent l’État de Palestine comme membre observateur de l’ONU. Auparavant, il a été accueilli de plein droit : au sein de l’Unesco en 2011, et en 2015 à la Cour pénale internationale (CPI).
De la colonisation à l’annexion
Hélas, au fur et à mesure que l’État de Palestine s’impose dans l’arène internationale, il s’efface sur le terrain. En ce début 2017, l’extrême droite israélienne engage en effet un tournant dans l’histoire du conflit israélo-palestinien : le passage de la colonisation à l’annexion. À l’initiative de Naftali Bennet, le leader du parti ultranationaliste Foyer juif, le Parlement vote, le 6 février 2017, celle de 4 000 logements dans des « avant-postes », ces colonies que même le droit israélien jugeait jusqu’ici illégal.
Enivré par l’élection de Donald Trump et enhardi par les scandales qui « plombent » le premier ministre Benyamin Nétanyahou, Naftali Bennet ne dissimule plus ses ambitions. Après le démantèlement de l’« avant-poste » d’Amona, il avait déclaré :
" Nous mettrons en place un nouveau régime juridique en Judée et en Samarie (appellation israélienne de la Cisjordanie) qui régulera la totalité des implantations, et de la perte douloureuse de ce bastion dans la montagne émergera l’application de la souveraineté d’Israël sur toute la Cisjordanie (Times of Israel, 1er février 2017)."
L’apartheid version israélienne
Mais quel sera le statut des Palestiniens ainsi annexés avec leur terre ? Pour le président de l’État d’Israël, Reuven Rivlin, la réponse est claire :
" Appliquer la souveraineté à une zone donne la citoyenneté à ceux qui y vivent. Il n’y a pas de loi [différente] pour les Israéliens et pour les non Israéliens."(Times of Israel, 14 février 2017)
Mais le président est isolé : la plupart des dirigeants israéliens excluent d’accorder aux Arabes de Cisjordanie le droit de vote dont jouissent les juifs (et, en Israël même, les Palestiniens). Autrement dit, ils envisagent une version israélienne de l’apartheid sud-africain.
C’est dire que l’État unique qui se profile n’a rien de commun avec la Palestine laïque et démocratique que prônait l’OLP à ses débuts ni avec la Fédération judéo-arabe rêvé par les binationalistes juifs en Palestine dans les années 1930. La communauté internationale ne saurait l’accepter.
Dominique VIDAL - Orient XXI
Dominique Vidal est journaliste et historien, codirecteur, avec Bertrand Badie, de L’État du monde (La Découverte).
logo et illustrations : © Hélène Aldeguer.