La guerre qui a canonisé la règle du jeu de la hasbara aux États-Unis
La ligne défensive prise par l’establishment juif-américain pendant l’invasion du Liban en 1982 a consolidé un grand nombre des méthodes qui sont déployées quand la violence d’Israël fait la une des journaux aujourd’hui.
En 1984, l’American Israel Public Affairs Committee (AIPAC) a commencé à diffuser ce que l’on décrit comme un « guide universitaire » destiné à faire comprendre le discours à propos d’Israël sur les campus. « Les étudiants américains sont régulièrement exposés à de virulentes dénonciations de l’État d’Israël, d’une façon dont la plupart des Américains ne le sont pas », prévient le chapitre d’ouverture du livret. Il fait remarquer un « déluge de propagande hostile non seulement envers la politique spécifique d’un gouvernement israélien donné, mais aussi envers le droit même de l’État d’Israël à exister » et qui est, poursuit l’auteur, « conçu pour délégitimer la seule démocratie viable du Moyen Orient et l’allié le plus fiable de l’Amérique dans la région ».
La responsabilité de cette campagne « anti-Israël », souligne le guide à maintes reprises, incombe aux « étudiants étrangers arabes » dont « le nombre augmente… dramatiquement ». À la fin du livre, on trouve des dossiers distillés sur 100 différentes universités américaines dont beaucoup nomment des professeurs respectés tels Edward Saïd, Walid Khalidi et James Zogby comme fers de lance de ces efforts sur leurs campus respectifs.
Le guide de l’AIPAC – qui a été présenté comme « la première étude complète sur la campagne anti-Israël sur les campus universitaires et ce qui est fait pour la combattre » - était loin d’être la première incursion de ce lobby dans la hasbara ou communication pro-Israël. Mais il était emblématique de l’intensification des efforts de l’establishment juif-américain pour combattre la critique d’Israël après l’énorme coup porté deux ans plus tôt à la réputation du pays quand le gouvernement dirigé par le Likoud a organisé une invasion et une occupation brutales du Liban.
En fait, dans son effort désespéré pour insister sur le fait que les images et les rapports qui ont filtré hors du Liban devaient être mis en doute ou même pas crus, la réponse unifiée de la hasbara à la guerre de 1982 a aidé à consolider une grande partie des approches qui sont maintenant déployées quand une agression israélienne fait les gros titres des médias internationaux. La dissimulation ; les accusations de partialité et de mensonge par omission ou falsification ; la minimisation ou le rejet des souffrances des Palestiniens et des Arabes – tout ceci a constitué l’épine dorsale d’une règle du jeu élaborée par de nombreuses associations juives-américaines, depuis la Première Intifada jusqu’à l’agression de 2014 sur Gaza et au soulèvement de mai 2021.