Reconstruire l’Histoire : destruction et reconstruction en Palestine
Début septembre, la galerie P21 de Londres a accueilli une importante exposition et une cérémonie de remise de prix, qui ont réuni histoire, politique et architecture contemporaine.
Le concours annuel est l’idée du Dr Salman Abu Sitta, fondateur de laPalestine Land Society, peut-être mieux connu pour son travail monumental d’élaboration de cartes très détaillées de la Palestine telle qu’elle était avant la Nakba de 1948.
Grâce à son travail, nous disposons de preuves méticuleusement documentées des plus de 500 villages qui ont été en grande partie détruits lors des attaques et de l’occupation israéliennes qui ont suivi le retrait britannique.
Cette immense base de données a servi de source d’inspiration pour un concours où les étudiants en architecture et en urbanisme choisissent l’un des villages d’une présélection de 100 et en proposent une reconstruction originale. Pour citer les organisateurs : « Les étudiants ont été encouragés à préserver les sites historiques et religieux et les ressources en eau traditionnelles comme les puits et les sources, qui jadis constituaient le cœur de la vie agricole palestinienne. »
Ils avaient également pour consigne de prendre en considération les communications avec les communautés voisines et de tenir compte des besoins du tourisme local, y compris les visiteurs d’al shatat (exil). Certains étudiants ont inclus des monuments à la mémoire des victimes de la Nakba et des chefs de la résistance palestinienne martyrisés en 1948.
C’est la deuxième année du concours ; l’année dernière, trois universités y ont participé, mais cette année, huit universités de Jordanie, du Liban et de Palestine y ont pris part. Le jury était composé de cinq éminents architectes d’Allemagne, de Palestine et du Royaume-Uni.
Le principe même du concours est clairement lié au thème du droit au retour des Palestiniens dans leur patrie – droit consacré par le droit international et réaffirmé chaque année par les Nations Unies. Le Dr Abu Sitta, né à Al Ma’in, dans le district de Beersheba, s’appuyant sur sa connaissance extraordinairement détaillée de toute la région, a évoqué avec éloquence la longue histoire de la Palestine et la continuité de la vie au fil des siècles dans ses villes et villages.
Cette année, le projet gagnant d’un étudiant de l’Université de Petra, en Jordanie, était inspiré du village d’Al Qastal perché sur une colline, près de Jérusalem, et détruit. Il a été récompensé d’un prix de 2000 livres et d’une bourse de voyage. M. Abu Sitta a souligné qu’Al-Qastal a été l’un des premiers villages à être attaqué et dépeuplé au printemps 1948. Le lendemain, le village de Deir Yassin devenait le théâtre de l’un des pires massacres de la Nakba.
235 villageois, hommes, femmes et enfants, ont été massacrés par les gangs sionistes le 9 mai 1948 à Deir Yassin. Un massacre parmi de nombreux autres, qui se sont déroulés alors qu’il n’y avait pas un seul soldat de la Ligue arabe en Palestine.
Le président du jury, le Dr Nasser Golzari de l’Université de Westminster, a rappelé à l’auditoire les conditions pratiques, physiques et mentales très difficiles dans lesquelles beaucoup d’étudiants travaillaient – en particulier ceux de l’Université islamique de Gaza, soumis depuis des années à un blocus paralysant.
Certains lauréats ont pu se joindre à l’auditoire via Skype pour parler de leur participation. Fait révélateur, la communication avec les étudiants de Gaza a été coupée en raison d’une des coupures d’électricité trop fréquentes imposées à la Bande de Gaza.
L’étudiante qui a reçu le deuxième prix avait choisi le village de Qula, près de Ramleh, qui a été complètement rasé et recouvert par la suite par une forêt. Elle a expliqué comment elle a pu concevoir la reconstruction du village, tout en préservant la forêt alentours.
le village de Qula entièrement rasé en 1948
Les étudiants lauréats de l’année dernière n’ont malheureusement pas pu profiter de la bourse de voyage qui leur a été accordée, car ils n’ont pas obtenu de visa pour voyager à l’étranger.
Le coordinateur local Antoine Raffoul a exprimé la résolution des organisateurs de s’assurer que les lauréats de cette année – et ceux de l’année dernière – puissent bénéficier de leur bourse de voyage. L’étude de la reconstruction d’un village italien gravement endommagé par un récent tremblement de terre sera inscrit au programme de leur voyage.
Il a ajouté qu’ils espéraient que le concours prenne progressivement une envergure internationale attirant la participation d’institutions et d’individus du monde entier.
sources : chroniques de Palestine
Rapport du Dr Hilary Wise et de Betty Hunter (Palestine Solidarity Campaign)
9 septembre 2018 – Middle East Monitor – Traduction : Chronique de Palestine – MJB