« J’ai dit à Arafat : Israël te promettra un centimètre et ne te donnera pas un millimètre. »

jeudi 28 septembre 2023

« J’ai dit à Arafat : Israël te promettra un centimètre et ne te donnera pas un millimètre. »

Se remémorant les accords d’Oslo trente ans plus tard, Hanan Ashrawi, politicienne chevronnée, raconte ses différends avec les dirigeants de l’OLP pendant les négociations et explique pourquoi la crise politique Israélienne ouvre des brèches dans le système d’occupation.

Par Meron Rapoport, le 13 Septembre 2023

Quand l’image du Docteur Hanan Ashrawi est apparue sur l’écran de mon ordinateur lors de notre appel Zoom il y a deux semaines, j’ai eu l’impression d’être propulsé dans le passé. Le public Israélien et international a appris à la connaître pour la première fois lors de la conférence de Madrid d’octobre 1991, l’un des sommets clés qui ont conduit à ce que l’on appelle le processus de paix. En tant que porte-parole de la délégation Palestinienne, Mme Ashrawi a éclipsé, grâce à ses compétences linguistiques et à ses apparitions à la télévision, une jeune star des médias Israéliens, Benjamin Netanyahu, qui venait d’être nommé vice-ministre des affaires étrangères à l’époque. Depuis lors, elle est une invitée de marque dans les studios des médias du monde entier, ainsi que dans ceux des Palestiniens et des Arabes.

Mais les négociations officielles entre Israéliens et Palestiniens ont cessé il y a près de dix ans, avec l’échec de l’initiative de médiation du secrétaire d’État américain de l’époque, John Kerry. Plus encore, les médias Israéliens se sont désintéressés de « ce que pensent les Palestiniens ». Après tout, l’ancien Premier ministre Ehud Barak avait enseigné aux Israéliens « qu’il n’y a pas de partenaire Palestinien pour la paix », alors pourquoi devrions-nous même les écouter ? La seule question que les Israéliens posent aujourd’hui aux Palestiniens est de savoir s’ils « luttent contre le terrorisme », c’est-à-dire s’ils aident Israël à exercer son autorité entre le fleuve et la mer.

Pourtant, Mme Ashrawi n’a pas changé d’avis, et elle reste vive, concentrée et riche en détails. Trente ans se sont écoulés depuis qu’elle a été choquée de découvrir – avec d’autres membres d’une délégation Palestino-Jordanienne menant ce qu’ils croyaient être des négociations officielles avec Israël à Washington – que d’autres pourparlers secrets se tenaient à Oslo entre Israël et l’OLP. Dès le début, Ashrawi n’a pas caché ses critiques à l’égard du processus d’Oslo, notamment en ce qui concerne la lettre de « reconnaissance mutuelle », dans laquelle l’OLP reconnaissait l’État d’Israël tandis qu’Israël reconnaissait l’OLP en tant que représentant du peuple Palestinien – mais pas le droit des Palestiniens à la création d’un État. « Lorsque j’ai vu la lettre, j’étais furieuse », m’a-t-elle dit.

Cependant, malgré ses critiques à l’égard du président de l’OLP Yasser Arafat (Abu ‘Ammar) et plus tard de son successeur Mahmoud Abbas (Abu Mazen), Ashrawi faisait partie intégrante de la direction Palestinienne et suivait de près les négociations. Elle a occupé pendant une courte période le poste de ministre de l’enseignement supérieur de l’Autorité Palestinienne, a été élue à deux reprises au Conseil législatif Palestinien et a siégé au comité exécutif de l’OLP, où elle était la seule femme parmi les 15 membres.

En 2020, Mme Ashrawi a démissionné de son poste au sein de l’OLP, en signe de protestation contre la décision de l’Autorité Palestinienne de renouveler la coordination de la sécurité avec Israël après l’avoir temporairement suspendue dans le sillage du «  Deal du siècle » du président américain Donald Trump. Récemment, elle a été nommée à la tête du conseil d’administration de l’université de Birzeit, bouclant ainsi la boucle avec l’institution où elle a enseigné la littérature anglaise et a été doyenne de la Faculté des Arts.

Dans son ton élégant et mesuré, Ashrawi regarde en arrière avec colère. Colère contre les Américains et les Européens qui n’ont pas tenu toutes leurs promesses aux Palestiniens. Colère contre les Israéliens qui ont utilisé Oslo comme un instrument pour parfaire l’occupation et éloigner les Palestiniens de l’indépendance. Et la colère – ou peut-être plus exactement la douleur – que les dirigeants Palestiniens en exil qui ont signé Oslo n’aient pas réalisé en temps réel qu’Israël les trompait. « Ils ne connaissaient pas les Israéliens, dit-elle, ils ne savaient pas, par expérience directe, comment fonctionne l’occupation.”

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Le ministre israélien des Affaires étrangères, Shimon Peres, signe les accords d’Oslo sur la pelouse de la Maison Blanche. Derrière lui, le président américain Bill Clinton, le président de l’OLP Yasser Arafat, le premier ministre israélien Yitzhak Rabin, le premier ministre palestinien Mahmoud Abbas et d’autres dirigeants mondiaux, Washington DC, 13 septembre 1994. (Avi Ohayon/GPO)

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