L’impunité d’Israël va-t-elle prendre fin ?

mercredi 22 mai 2024

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Photo : Cour pénale internationale © Greger Ravik

Le 20 mai 2024 restera dans l’histoire du droit international comme le jour où la levée de l’impunité d’Israël a enfin pu être envisagée, un moment historique pour la justice internationale, pour la Cour pénale internationale et pour le droit des peuples.

Ce jour-là, le procureur de la Cour pénale internationale Karim Khan, a requis des mandats d’arrêt internationaux pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité à l’encontre de Benyamin Nétanyaou et Yoav Gallant, son ministre de la Défense : ils sont accusés d’avoir délibérément affamé et attaqué des civils et également des crimes de persécution et extermination contre la population de Gaza.

Sont également visés trois dirigeants du Hamas : le chef du bureau politique, Ismaïl Haniyeh, le commandant des brigades Al-Qassam Mohammed Deïf, et le chef du Hamas à Gaza Yahya Sinwar ; ils sont, quant à eux, poursuivis comme responsables d’extermination, de meurtre, de prise d’otages, de viol, de torture et d’actes inhumains.

Si la Cour internationale de Justice juge les États et leurs politiques, la Cour pénale internationale, instituée par le traité de Rome, statue sur la responsabilité des personnes qui se rendent coupables de crimes de guerre, de crimes contre l’humanité ou du crime de génocide, tels que définis par le traité de Rome.

Karim Khan avait déclaré le 3 mai dernier que le bureau de la CPI faisait l’objet de pressions et de menaces depuis l’annonce de l’imminence de sa décision. Nous nous félicitons que la CPI et son procureur aient su résister à ces menaces.

L’AFPS a toujours considéré que les responsables des crimes commis le 7 octobre devraient rendre des comptes devant les juridictions internationales et qu’il appartenait à ces juridictions de qualifier ces faits.

L’AFPS ne peut donc que se féliciter que la CPI statue, sur les crimes commis le 7 octobre, mais aussi bien évidement sur ceux commis depuis sous les ordres des deux principaux responsables du génocide en cours dans la bande de Gaza.

Elle regrette toutefois que Karim Khan ait omis de rappeler le contexte dans lequel ces crimes ont été commis, le contexte de dépossession et de nettoyage ethnique continue depuis 76 ans.

Si les juges de la Chambre préliminaire de la CPI sont convaincus qu’il existe des motifs raisonnables de croire que ces crimes ont été commis, les mandats d’arrêt seront confirmés.

Les 124 États membres de la CPI, y compris les nombreux États européens soutenant Israël, seraient alors dans l’obligation d’arrêter les personnes visées par ces mandats s’il se rendaient sur leur territoire.

D’autres faits devront être examinés par la CPI, en particulier les crimes commis par Israël dans le territoire palestinien occupé depuis 2014 et particulièrement lors de la Grande marche du retour de mars à juin 2018, mais aussi le crime de génocide à l’encontre des responsables israéliens actuellement examiné par la Cour internationale de justice.

La CPI est également compétente pour les crimes commis par des ressortissants d’États parties et par des ressortissants d’États non parties sur le territoire d’un État partie ; cela doit pouvoir concerner des ressortissant·es français·es ou binationaux engagé·es dans l’armée israélienne à Gaza et en Cisjordanie.

Les atrocités commises par Israël contre les prisonniers palestiniens et sa complicité active dans la violence des colons en Cisjordanie ayant causé de nombreuses morts et destructions doivent également faire l’objet d’enquêtes approfondies.

Ainsi, d’autres dirigeants israéliens comme Ben Gvir et Smotrich mais et plus largement les membres du cabinet de guerre devraient également faire l’objet d’enquêtes de la CPI.

Les réactions très hostiles d’Israël et des États-Unis à la déclaration du procureur Khan n’ont étonné personne. La France quant à elle a déclaré soutenir la CPI et la lutte contre l’impunité dans toutes les situations.

L’AFPS s’en félicite et espère qu’elle se tiendra à cette résolution qui prouve que nul n’est au-dessus du droit.

Anne Tuaillon, sa présidente, a déclaré : « La France doit garantir que les membres de la CPI puissent mener à bien ces investigations jusqu’à leurs conclusions, en dehors de toute pression et menace. Ce serait l’occasion de prouver que la France tourne enfin la page du deux poids deux mesures et rompt avec le soutien inconditionnel à Israël qui avait prévalu jusque-là en dépit de l’accumulation des actes criminels commis par ses dirigeants. »

Source : Bureau national de l’AFPS, le 21 mai 2024