Le Hamas, une organisation terroriste ? Voici ce que dit le droit

vendredi 10 novembre 2023

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Rassemblement du mouvement Hamas à Gaza - Photo : via Hamas.ps
Par Christophe Oberlin

Pour les historiens la Palestine existe depuis plus de 3000 ans, pour les juristes l’Etat moderne de Palestine depuis un siècle. Avec des frontières reconnues, un système judiciaire propre, des passeports palestiniens, des timbres et une monnaie palestinienne. Un État de Palestine qui a passé des accords internationaux avec les pays environnants, et comprend la puissance mandataire du Royaume-Uni.

Alors, la guerre ne date pas du samedi 7 octobre 2023. La Palestine est en guerre depuis 1948. Et elle ressemble à un volcan en activité qui gronde chaque jour de souffrance et de colère. Avec parfois des explosions. L’éruption à laquelle nous assistons aujourd’hui est la plus puissante depuis 1948.

Le peuple palestinien ne revendique rien : il exige le rétablissement de ses droits souverains sur sa terre. L’éruption actuelle est la conséquence de cette violation initiale du droit. Pourtant, pour les gouvernements occidentaux, c’est le peuple palestinien qui serait devenu le coupable. L’action juridique, par le jeu des principes, permet de rétablir la réalité.

Il faut revenir à l’origine du conflit, à 1917, avec la volonté occidentale de créer une implantation au Moyen Orient pour contrôler les peuples arabes, en utilisant la politique sioniste. Israël est la puissance militaire occupante à Gaza, malgré son retrait du territoire, car il s’assure un contrôle total. Selon le droit coutumier, Israël doit la protection à la population occupée.

Or, non seulement il ne la protège pas, mais il l’agresse par le blocus, les bombardements et maintenant le siège total depuis le 9 octobre 2023. Les décisions politiques israéliennes rendues en détention les résistants palestiniens sont présentées comme des « jugements », ce qui donne une apparence de régularité.

Or, il s’agit de prisonniers de guerre, qu’Israël n’a pas le droit de juger, par application de la 3 ème convention de Genève. Même sous l’angle de la 4 ème convention, les « jugements » sont illégaux : procès tenus en dehors du territoire palestinien, procédure ne respectant pas le procès équitable.

Aussi, les palestiniens détenus sont des otages politiques d’Israël. Il n’y a donc pas « les otages du Hamas » d’un côté et les « Palestiniens prisonniers d’Israël » de l’autre. Selon la Cour Pénale Internationale, seul tribunal international habilité à traiter des crimes de guerre, la Palestine est un État.

De fait l’Etat de Palestine siège à l’assemblée des Etats-parties de la CPI, à égalité de droits et de devoirs avec les 122 autres Etats. Ainsi, les puissances occidentales qui nient la réalité de l’État de Palestine sont en contradiction avec elles-mêmes.

Le Hamas a affirmé son accord avec le droit international et sa volonté de coopération avec le CPI. A l’inverse, Israël refuse le droit international, et refuse toute coopération avec le CPI.

C’est le Hamas qui est en phase avec le droit, et Israël qui dénie le droit. Les crimes actuellement commis sont la conséquence de ce déni du droit.

Le statut de la CPI définit une longue liste d’infractions, et aucune ne fait référence au terrorisme, car ce mot a toujours été utilisé pour discréditer les opposants politiques (De Gaulle, Mandela…).

Aussi, le Hamas, qui a reconnu la CPI et veut coopérer, rejette cette accusation de « terrorisme », qui est un concept politique et médiatique, mais pas juridique. Le Hamas n’a d’ailleurs jamais figuré sur la liste des organisations terroristes de l’ONU.

Les faits commis par les attaquants palestiniens sur le territoire actuel d’Israël seront jugés par Israël et les puissances occidentales (procédure déjà ouverte en France). Israël n’acceptera pas de confier ses affaires à la CPI.

La CPI est pourtant compétente du fait de la nationalité palestinienne des combattants, mais elle applique a le principe de subsidiarité : elle n’intervient qu’en l’absence de procédures conduites par les juges nationaux.

Pour compléter votre lecture : https://www.chroniquepalestine.com/...

Source  : CHRONIQUE PALESTINE

Auteur : Christophe Oberlin
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* Christophe Oberlin est Professeur des universités et chirurgien spécialisé dans la microchirurgie et la chirurgie de la main. Il dirige régulièrement des missions chirurgicales en Palestine et particulièrement dans la bande de Gaza où il a effectué de très nombreux séjours.
Il a écrit plusieurs ouvrages dont « Le chemin de la Cour – Les dirigeants israéliens devant la Cour Pénale Internationale » et traduit de l’anglais « Histoire de la politique étrangère du Hamas ».