Israël-Palestine. De la colonisation à l’apartheid, en ligne droite

vendredi 5 mai 2023

L’annonce du débat du 4 mai 2023 à l’Assemblée nationale française autour d’une résolution condamnant « l’institutionalisation par l’État d’Israël d’un régime d’apartheid consécutif à sa politique coloniale » a suscité protestations outragées, rugissements d’indignation et accusations prévisibles d’antisémitisme. Ces réactions s’expliquent souvent par un aveuglement sur la réalité coloniale du sionisme.

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Affiche promotionnelle du film de Juda Leman, The Land of promise, 1935
National Photo Collection of Israel, Photography dept. Goverment Press Office/Wikimedia Commons

Apartheid ? Comment osez-vous ? Jusqu’au président de la République française Emmanuel Macron qui gronde contre l’utilisation « à mauvais escient de termes historiquement chargés et infamants pour décrire l’État d’Israël ». Le Parlement israélien n’a pas ces pudeurs de nombre de responsables politiques français quand il entérine publiquement cet état d’apartheid en adoptant une loi fondamentale à valeur constitutionnelle, le 19 juillet 2018, intitulée « Israël en tant qu’État-nation du peuple juif », dont l’article 1 proclame haut et fort : « L’exercice du droit à l’autodétermination nationale dans l’État d’Israël est réservé au peuple juif », droit refusé aux Palestiniens citoyens du même État, mais accordé à un juif installé en Argentine ou en Ukraine. Et le nouveau gouvernement de Benyamin Nétanyahou a gravé dans son programme que le peuple juif a « un droit inaliénable et exclusif sur toutes les parties de la Terre d’Israël » et va développer la colonisation en « Galilée, dans le Néguev, dans le Golan et en Judée Samarie ».

S’il est si déstabilisant pour certains d’accepter cette réalité d’apartheid pointée par beaucoup d’organisations de défense des droits humains, c’est parce qu’elle remet en cause nombre de mythes sur le sionisme et l’État d’Israël dans lequel des personnes de bonne foi voient une sorte de miracle, de « renaissance du peuple juif sur la terre de ses ancêtres », une juste réparation de l’Holocauste. Autant d’éléments qui ont contribué à absoudre le mouvement sioniste de son péché originel : sa dimension coloniale.

« Une terre vide »

À partir des « grandes découvertes », au XVe siècle se développe un grand mouvement de conquête par l’Europe des autres continents, qui entre dans l’histoire sous le nom de « colonialisme ». Dans son livre Terra nullius, le journaliste suédois Sven Lindqvist précisait la définition de ces « terres vides » que l’on pouvait conquérir : Au Moyen Âge, c’est la terre qui n’appartient à aucun souverain chrétien. Plus tard, c’est celle qu’aucun pays européen n’a encore revendiquée, la terre qui revient de droit au premier pays européen à l’envahir. Une terre vide. Une terre déserte.

Le colonialisme se déploya en deux versions : dans la majorité des cas, les pays conquis furent dirigés par quelques milliers d’administrateurs et soldats de la métropole ; en revanche, le « colonialisme de peuplement » s’accompagna de l’installation massive d’Européens — comme en Amérique du Nord, Afrique australe, Algérie, Nouvelle-Zélande, Australie et, dernier exemple en date, en Palestine (mais dans un contexte historique différent, celui du XXe siècle et du début des grands mouvements anticoloniaux) — et d’un bouleversement démographique.

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