Donald Trump menace de tuer ma famille. Le monde va-t-il l’arrêter ?

Non, il ne s’agit pas simplement d’un « avertissement », d’une énième déclaration « controversée » du président américain.

Le président américain Donald Trump s’adresse à une session conjointe du Congrès au Capitole américain le 4 mars 2025 à Washington, DC [Win McNamee/Pool via Reuters]
« Aux habitants de Gaza : un bel avenir vous attend, mais pas si vous retenez des otages. Si vous le faites, vous êtes MORTS ! Prenez une décision INTELLIGENTE. LIBÉREZ LES OTAGES MAINTENANT OU VOUS SEREZ L’ENFER À PAYER PLUS TARD ! »
Ces mots n’étaient pas ceux d’un provocateur d’extrême droite tapi dans un coin sombre d’Internet. Ils n’étaient pas criés par un chef de guerre déchaîné en quête de vengeance. Non, ce sont les mots du président des États-Unis, Donald Trump, l’homme le plus puissant du monde. Un homme qui, par sa signature, son discours ou une simple phrase, peut façonner le destin de nations entières. Et pourtant, malgré tout ce pouvoir, toute cette influence, ses mots adressés au peuple de Gaza n’étaient pas des mots de paix, ni de diplomatie, ni de soulagement – mais de mort.
Je les lis et je me sens malade.
Car je sais exactement à qui il s’adresse. Il s’adresse à ma famille. À mes parents, qui ont perdu des proches et leur maison. À mes frères et sœurs, qui n’ont plus d’endroit où retourner. Aux enfants affamés de Gaza, qui n’ont rien fait d’autre que de naître dans un peuple que le monde a jugé indigne d’exister. Aux mères en deuil qui ont enterré leurs enfants. Aux pères qui ne peuvent rien faire d’autre que regarder leurs bébés mourir dans leurs bras. Aux personnes qui ont tout perdu et qui pourtant doivent encore endurer davantage.
Trump parle d’un « bel avenir » pour la population de Gaza. Mais il n’y a plus d’avenir là où les maisons ont disparu, où des familles entières ont été anéanties, où des enfants ont été massacrés.
Je lis ces mots et je me demande : dans quel genre de monde vivons-nous ?
Un monde où le leader du soi-disant « monde libre » peut prononcer une condamnation à mort générale contre une population entière – deux millions de personnes, dont la plupart sont déplacées, affamées et s’accrochant à peine à la vie. Un monde où un homme qui commande l’armée la plus puissante peut s’asseoir dans son bureau, à l’abri des cris, du sang, de l’odeur insupportable de la mort, et déclarer que si les habitants de Gaza ne se plient pas à sa demande – s’ils ne trouvent pas et ne libèrent pas par magie des otages sur lesquels ils n’ont aucun contrôle – alors ils sont tout simplement « morts ». Un monde où les survivants du génocide se voient imposer un ultimatum de mort massive par un homme qui prétend défendre la paix.
Ce n’est pas seulement absurde, c’est diabolique.
Les propos de Trump sont criminels. Ils constituent une approbation directe du génocide. Les habitants de Gaza ne sont pas responsables de ce qui se passe. Ils ne détiennent pas d’otages. Ils sont les otages – piégés par une machine de guerre israélienne qui leur a tout volé. Les otages d’un siège brutal qui les a affamés, bombardés, déplacés, les a laissés sans aucun endroit où aller.
Et maintenant, ils sont devenus les otages de l’homme le plus puissant de la Terre, qui les menace de davantage de souffrances, de davantage de mort, à moins qu’ils ne répondent à une demande qu’ils sont incapables de satisfaire.
Le plus cynique est que Trump sait que ses propos ne rencontreront aucune réaction significative. Qui, dans l’establishment politique américain, lui demandera des comptes pour ses menaces de génocide ? Le Parti démocrate, qui a permis la guerre génocidaire d’Israël contre Gaza ? Le Congrès, qui soutient massivement l’envoi d’une aide militaire américaine à Israël sans condition ? Les médias grand public, qui ont systématiquement effacé les souffrances des Palestiniens ? De telles déclarations n’ont aucun coût politique pour Trump. Au contraire, elles renforcent sa position.
Voilà le monde dans lequel nous vivons. Un monde où les vies palestiniennes sont tellement jetables que le président des États-Unis peut menacer de mort massive sans craindre aucune conséquence.
J’écris ceci parce que je refuse que cela ne soit qu’une autre déclaration scandaleuse de Trump dont les gens se moquent, que les médias transforment en spectacle, que le monde oublie. J’écris ceci parce que Gaza n’est pas un sujet de discussion. Ce n’est pas un titre. C’est ma maison. Ma famille. Mon histoire. Mon cœur. Mon tout.
Et je refuse d’accepter que le président des États-Unis puisse adresser des menaces de mort à mon peuple en toute impunité.
Les habitants de Gaza ne sont pas maîtres de leur destin. Ils n’ont jamais eu ce luxe. Leur sort a toujours été dicté par les bombes qui leur tombent dessus, par le siège qui les affame, par les gouvernements qui les abandonnent. Et maintenant, leur sort est dicté par un homme à Washington, DC, qui ne voit aucun inconvénient à menacer d’anéantir une population entière.
Alors je me demande à nouveau : dans quel genre de monde vivons-nous ?
Et combien de temps allons-nous laisser les choses ainsi ?
Source : Aljazeera
Auteur :

Ahmed Najar est un analyste politique et dramaturge palestinien.