Gaza-Liban. La voie perdue de la France

jeudi 28 novembre 2024

Depuis le début de la guerre contre Gaza, la France peine à se faire entendre sur la scène régionale. Le tournant pro-israélien de sa politique depuis quinze ans s’est confirmé durant ces derniers mois. Et ses ambiguïtés face aux décisions de la Cour pénale internationale d’inculper Beyamin Nétanyahou et Yoav Gallant n’arrangent pas les choses.

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Fin aout 2023, Emmanuel Macron prononçait à l’ouverture de la traditionnelle conférence des ambassadeurs de France un long discours au cours duquel il exposait les grandes orientations de politique étrangère du moment. Cet exercice solennel, à l’élaboration duquel le Quai d’Orsay était étroitement associé, prenait la forme d’une feuille de route pour les diplomates français. De longs développements ont été consacrés à la guerre d’Ukraine, à la relation avec la Russie, au dialogue avec la Chine et partant à la région de l’Indopacifique, désignée comme la nouvelle priorité géopolitique. Le président s’est étendu sur les crises en Afrique, notamment au Sahel où la présence française était remise en cause par la succession de putschs militaires.

MARGINALISATION DE LA REVENDICATION PALESTINIENNE

De manière surprenante, le conflit israélo-palestinien, considéré comme une question structurante de la politique étrangère depuis des décennies, n’a fait l’objet d’aucune mention. Cette allocution a été prononcée deux mois avant la nouvelle guerre de Gaza, déclenchée après l’attaque du Hamas en territoire israélien, le 7 octobre 2023. L’un des conseillers du président que j’approchais justifiait cette omission par le « pragmatisme » qui animait le président sur une question qui aurait perdu sa centralité depuis la signature des accords d’Abraham, signés à la Maison-Blanche en septembre 2020, lesquels actaient la normalisation des relations entre Israël, les Émirats arabes unis et le Bahreïn. Tandis que le Maroc et le Soudan s’y associaient peu de temps après, de fortes pressions américaines s’exerçaient sur l’Arabie saoudite pour rejoindre un mouvement qui modifiait la donne géopolitique dans la région, en marginalisant la question de la création d’un État palestinien.

Le pragmatisme présidentiel, devenu une quasi-doctrine en politique étrangère, ne tenait pas compte de la réalité de la situation explosive dans le territoire de Gaza, soumis à un blocus total et en Cisjordanie où la colonisation se développait, accompagnée des exactions des colons. De nouvelles formes d’Intifada, des frondes à Gaza et des couteaux en Cisjordanie, à l’initiative de jeunes palestiniens, se répandaient provoquant une répression impitoyable des forces de sécurité israéliennes.

Depuis plusieurs années, les diplomates européens, notamment les consuls à Jérusalem, alertaient leurs capitales sur la situation explosive dans les Territoires palestiniens et rapportaient régulièrement le renforcement de la colonisation et la confiscation de milliers d’hectares au nom de la sécurité d’Israël. En vain. Je publiais, avec un collectif d’anciens diplomates, une tribune dans Le Monde (25 novembre 2023), dénonçant le silence de la diplomatie française. Il s’avérait clairement que le président ne s’appuyait pas sur une vision globale des conflits qui agitent le Proche et Moyen-Orient. Les déclarations et les initiatives parfois pertinentes, s’égrenaient au fil des évènements, sans qu’apparaisse une quelconque cohérence. Le « en même temps », élevé en doctrine en politique intérieure, n’a pas de pertinence en politique étrangère.

UNE INITIATIVE INOPÉRANTE

C’est flagrant depuis la guerre de Gaza et l’extension du conflit au Liban. La diplomatie française est devenue illisible, pour ne pas dire incohérente. Ainsi, Emmanuel Macron, qui se rend en Israël après le 7 octobre plusieurs jours après le président des États-Unis, le chancelier allemand, la présidente de la Commission européenne et plusieurs dirigeants européens, annonce à sa descente d’avion une initiative inattendue que je qualifierai aussitôt, d’ « inopérante ». La coalition internationale formée en 2014, avec l’aval du conseil de sécurité de l’ONU, pour éradiquer l’Organisation de l’État islamique (OEI) en Syrie et en Irak pourrait voir son mandat s’étendre à la lutte contre le Hamas selon le président. C’est ignorer que le mouvement islamiste palestinien n’est pas considéré comme une organisation terroriste par les pays arabes membres de la coalition contre l’OEI, ni d’ailleurs par une majorité de pays membres de l’ONU. L’initiative française a provoqué la sidération dans le monde arabe, plus particulièrement dans les opinions publiques de ces pays.

SOURCE : Orient XXI


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