Guerre contre Gaza : comment les Palestiniens résistent au désespoir existentiel

vendredi 4 avril 2025

La barbarie génocidaire d’Israël a laissé beaucoup de gens se demander comment, au 21e siècle, le monde peut permettre que ce massacre continue.

En période de crise humanitaire grave, qu’elle soit naturelle ou provoquée par l’homme, de profondes interrogations et des doutes surgissent généralement quant au sens de la vie. Ces questions pèsent lourdement sur les individus et les communautés, surtout lorsque le salut ne semble pas se profiler à l’horizon.

Source : Middle East Eye le 2 avril 2025
Par Awad Abdelfattah
https://www.middleeasteye.net/opinion/war-gaza-how-palestinians-are-resisting-existential-despair
Traduction IA

Photo : Un Palestinien accomplit les prières de l’Aïd el-Fitr à la mosquée historique Omari de la ville de Gaza, le 30 mars 2025 (Omar al-Qattaa/AFP)

Dans l’Europe du XIXe siècle, les progrès de la pensée politique et la notion de gouvernance démocratique ont favorisé un climat d’optimisme et de rêves ambitieux. Mais cette transformation a rapidement été confrontée aux horreurs des Première et Seconde Guerres mondiales.

Ces conflits ont coûté la vie à des millions de personnes et dévasté des sociétés, tant physiquement que spirituellement. Ces destructions généralisées ont profondément ébranlé les acquis de la modernité, suscitant une résurgence de questions existentielles en philosophie, en littérature et en art – une reconsidération de la nature humaine et de l’âme.

Après la Seconde Guerre mondiale, de profondes réévaluations ont permis d’établir de nouvelles bases pour les relations internationales. La Déclaration universelle des droits de l’homme a été promulguée parallèlement à des lois mondiales visant à prévenir le génocide au lendemain de l’Holocauste. Le massacre de millions de Juifs par l’Allemagne nazie a donné naissance au slogan : « Plus jamais ça ».

Il est à la fois stupéfiant et terrifiant que les mêmes nations et groupes qui ont établi ces principes répètent aujourd’hui leur sombre histoire à travers la Palestine . À Gaza , nous assistons à un génocide systématique et à une stratégie délibérée visant à anéantir un peuple entier.

Par leur complicité dans le nettoyage ethnique israélien , les nations occidentales rappellent aux nouvelles générations les fondements sur lesquels ces pays ont été bâtis : l’extermination et l’éradication des peuples autochtones. Elles réaffirment ainsi leur mentalité suprémaciste et raciste profondément ancrée.

Cette douloureuse réalité est précisément ce qui replonge les gens dans une spirale de désespoir existentiel. Elle soulève également un profond dilemme : comment survivre dans un tel monde, et existe-t-il un cadre éthique capable d’empêcher un effondrement intérieur total ?

Une sauvagerie indescriptible

Pour beaucoup, la foi offre une forte immunité face à cette question et aux doutes qu’elle peut susciter. Elle apporte sens et refuge ; il en va de même pour les personnes engagées dans des causes humanitaires ou de libération, qu’elles soient religieuses ou laïques.

Pourtant, des questions existentielles peuvent surgir lorsque les gens constatent que leurs réserves de résilience intérieures s’épuisent. C’est une expérience naturelle et profondément humaine.

À Gaza, la résilience d’un peuple qui a enduré un an et demi de génocide brutalement perpétré par Israël est tout simplement légendaire. Lorsque les habitants de Gaza interrogent le monde qui les entoure, ils se concentrent avant tout sur l’état de l’humanité : sur ceux qui dirigent des empires impérialistes et génocidaires, et sur les régimes arabes soumis à la puissance occidentale.

À l’ère du consumérisme, de la cupidité et de l’oppression, nul peuple sur terre ne possède peut-être une aussi étonnante capacité d’endurance que le peuple palestinien. Pourtant, de nombreux Palestiniens nous implorent de ne pas les considérer comme des héros, mais plutôt comme des êtres humains ordinaires, sans autre refuge que la foi et la persévérance.

Ce dont ils ont réellement besoin, c’est d’un soutien concret. Les Palestiniens ont enduré d’innombrables épreuves horribles qui ont décimé des générations entières. Leur confrontation prolongée avec le projet colonial sioniste a donné naissance à une littérature abondante, dont certaines sont profondes et essentielles, tandis que d’autres ne relèvent guère plus que de la rhétorique superficielle.

Cependant, même les critiques les plus radicales et les plus perspicaces n’ont pas réussi à se concrétiser en un plan stratégique concret.

Mais la question existentielle n’a jamais été posée avec la même intensité et la même urgence qu’aujourd’hui, tant parmi les Palestiniens que parmi leurs alliés à travers le monde. La guerre engendre d’innombrables tragédies et récits de souffrance. Face à une telle dévastation, l’humanité elle-même commence à dépérir.

Cette guerre brutale contre Gaza est menée par la force militaire la plus puissante du monde, l’impitoyable empire américain et ses alliés, contre une entité minuscule et démunie. Cette sauvagerie indicible est diffusée en temps réel, tandis que les auteurs se délectent de la destruction de maisons et de l’extermination d’enfants, de femmes et de personnes âgées.

Face à une telle barbarie, le monde est sous le choc et l’horreur, se demandant : comment une telle impunité a-t-elle pu se produire au XXIe siècle ? Comment est-il possible que l’humanité, ou ceux qui gouvernent le monde, n’aient rien appris de l’histoire ?

Cette terreur face à la nature du système mondial et à ses fondements sionistes a alimenté un front civil international, qui représente un extraordinaire carrefour de luttes. Tout comme les générations passées ont triomphé de la tragédie, la génération actuelle, profondément sensible à l’injustice, croit en la possibilité de restaurer la dignité humaine et de traduire en justice les auteurs de violences.

De cette façon, le peuple palestinien et ses partisans du monde entier résistent à l’attrait du désespoir existentiel, tout en forgeant une vision libératrice face à la barbarie pure et simple.

Awad Abdelfattah est écrivain politique et ancien secrétaire général du parti Balad. Il est le coordinateur de la campagne « Un seul État démocratique », basée à Haïfa et créée fin 2017.


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