“Nous voulons rester”
Ahlam Khalil, 19 ans, refuse l’avenir que le gouvernement israélien a prévu pour elle. "Nous voulons rester. Le gouvernement essaie de nous prendre tout ce que nous aimons. Comment pensez-vous que nous allons nous sentir ? Ce sera la chose la plus dure à affronter," dit-elle, assise devant sa porte dans le village bédouin d’Atir, dans le désert du Naqab, au sud de ce qui est actuellement Israël.
“Nous voulons rester”
Ahlam Khalil devant une structure démolie par les autorités de l’Etat dans le village non reconnu d’Atir, dans le Naqab, en 2014.
Après plus d’une décennie de contentieux, la haute cour israélien a statué en mai de l’an dernier que l’Etat est légalement autorisé à démolir le village d’Atir, ainsi que son voisin Umm al-Hiran. Atir deviendra une extension de la forêt plantée de Yatir alors que Umm al-Hiran deviendra la colonie juive de "Hiran"
Non reconnus
Les deux villages, dont les populations s’élèvent à environ 1.000 habitants, font partie de la quarantaine de communautés palestiniennes bédouines vivant dans le Naqab, qu’Israël appelle "le Néguev", qui ne sont pas reconnues par l’Etat et ne reçoivent pas les services de base comme l’eau et l’électricité.
Dans de nombreux cas, ces villages pré-existent à la création de l’Etat d’Israël. Dans le cas de Umm al-Hiran et Atir, les habitants ont été transférés de force en 1956, par ordonnances militaires, de leur village originel de Khribet Zubaleh, "qu’ils avaient cultivés depuis des siècles," précise le groupe de défense des droits Adalah.
Le gouvernement accélère le développement dans le Naqab. De nouvelles routes, des zones industrielles, des bases militaires et un réseau de chemin de fer sont en construction pour transformer cette région jadis marginalisée en "Silicon Valley" israélienne.
Transfert forcé
Mais ces plans ne sont pas dans l’intérêt des communautés bédouines indigènes. Suhad Bishara, d’Adalah, dit que "la plupart des projets de développement [d’Israël] visent à faire venir des communautés juives dans la région, en particulier dans le Naqab."
Au lieu de leur procurer les services qui font cruellement défaut, au cours des dernières années, le gouvernement israélien a cherché à transférer de force des dizaines de milliers de Bédouins vivant dans les communautés non reconnues du Naqab, un projet connu sous le nom de Plan Prawer.
Des protestations de masse ont fait capoter ce plan mais Adalah dit que la décision de la haute cour sur Atir et Umm al-Hiran "donne à l’Etat une portée juridique plus large pour détruire ces communautés."
C’est pourquoi les habitants comme Ahlam Khalil insistent sur la reconnaissance, pas la démolition.
[**Silvia Boarini est une photojournaliste basée à Bir al-Saba ; elle travaille actuellement sur un documentaire sur les Bédouins du Naqab.*]
source : http://www.ism-france.org