Je suis revenu aujourd’hui

Témoignage de Dr Ezzideen sur "X" le 12 octobre 2025
@ezzingaza
Traduction par IA
https://x.com/ezzingaza
Médecin, parfois écrivain. Révélateur d’histoires cachées, porte-parole de ceux qui ne sont pas entendus. Témoin des profondeurs les plus sombres de l’humanité.
Je suis revenu aujourd’hui. Je pensais avoir déjà connu le désespoir, mais ce que j’ai vu aujourd’hui dépasse le désespoir.
Ce n’est ni chagrin, ni horreur, ni douleur. C’est quelque chose de plus froid, un silence où même Dieu semble avoir retiré sa main.
Le ciel était d’un bleu impossible. Ce bleu qui vous nargue, qui vous fait vous demander si la beauté elle-même n’est pas un crime.
J’ai parcouru des rues qui n’existent plus, des rues qui étaient mon enfance.
Ils ne sont plus qu’un désert de pierres, de fils et de poussière.
Un homme se tenait sur un tas, un voisin, je crois.
Il a pointé du doigt et a dit : « C’est ici. »
Je lui ai demandé jusqu’où.
Il a regardé vers le bas.
Et j’ai compris : ma maison était sous ses pieds.
J’ai soulevé mon téléphone, comme si la machine pouvait reconnaître ce que je ne pouvais pas. L’écran brillait ; il n’y avait rien à voir. La terre avait englouti les distances. Même l’odeur du foyer avait disparu. C’était comme si le fil qui me reliait à la vie elle-même avait été coupé.
J’ai creusé avec mes mains. La poussière brûlait. Mes paumes saignaient.
Ma mère m’avait dit : « Cherche tout ce que nous pouvons sauver. » Alors je lui ai obéi comme un fils obéit à la dernière voix qui croit encore que l’obéissance a un sens.
D’une maison qui a coûté à mon père cent vingt mille dollars, une vie de travail, d’espoir, de décence, j’ai trouvé deux choses :
un couteau et un oreiller.
Deux vestiges de civilisation. L’un par nécessité, l’autre par illusion.
Voilà ce qui reste de l’homme.
J’étais assis dans les ruines, le bleu de ma chemise était devenu gris à cause des cendres, et je pensais :
ce n’est pas la fin d’une ville, mais du sens lui-même.
J’ai pensé à mes parents, à leurs mains, à leur foi dans le travail honnête.
Comment supporteront-ils cela ? Comment un homme supportera-t-il de voir le toit de son père réduit en poussière par des mains étrangères, des mains qui ne connaîtront jamais le nom de ceux qu’ils ont détruits ?
Mais ce qui me déchire plus que la ruine, c’est le silence. Personne ne nous parle.
Personne ne nous dit où aller, qui reconstruira ou qui est responsable.
Les politiciens parlent de victoires, les généraux de stratégie, le monde de paix et de progrès.
Mais aucun d’eux ne vit ici parmi les cendres. Aucun d’eux ne se tient là où je me tiens, à fouiller ses propres morts.
Et ceux qui prétendent nous représenter, où sont-ils ? Où est l’argent qu’ils ont collecté en notre nom, les promesses qu’ils ont faites devant les caméras, les slogans qu’ils ont écrits pendant que nous enterrions nos enfants ?
Qui parmi eux viendra à cette ruine et dira : Pardonnez-nous, nous vous avons déçu ?
Pas un seul.
Ils sont assis dans des bureaux, chemises propres, comptant nos cadavres comme des chiffres sur du papier. Ils parlent de « reconstruction », « aide », « négociations », comme si le vocabulaire du pouvoir pouvait combler le vide du lit d’une mère.
Je vous le dis en vérité : il n’y a pas de plus grand crime que l’indifférence.
Le meurtrier au moins reconnaît la victime.
Mais ceux qui détournent le regard tuent l’âme elle-même.
J’ai épousseté ma chemise, même si je savais que c’était inutile.
Je voulais voir s’il restait encore de la couleur dans le monde.
Il n’y en avait pas.
Le bleu était devenu la couleur du deuil.
J’ai regardé mes mains. Elles tremblaient, non pas de peur, mais de l’insoutenable constat que nous sommes devenus des biens matériels pour le monde.
Notre souffrance est un divertissement, notre mort une politique, notre endurance une statistique.
J’ai alors pleuré, ouvertement, sans honte.
Moi qui croyais autrefois à la dignité de la souffrance, je vois maintenant que la dignité elle-même a été anéantie.
Il n’y a rien de noble à être oublié.
Si vous lisez ceci, n’admirez ni le style ni le langage.
Baissez la tête et pleurez.
Parce que cette poussière, ce silence, ce cri, c’est ce qui reste de nous.
Je suis médecin à Gaza. Chaque jour je traverse les ruines, cousant des blessures que le monde ne verra jamais. Et la nuit, j’écris, car certaines vérités ne peuvent pas rester enfouies.
Si mes paroles vous sont parvenues, ce n’est pas par hasard. C’est parce que la souffrance exige d’être vue.
Aidez-moi à mettre ce livre au monde. Ni pour la reconnaissance, ni pour s’échapper. Mais parce que la mémoire, une fois écrite, ne peut pas être effacée.
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