Financement du Dôme de fer : ne vous y trompez pas, l’aide américaine à Israël ne vise pas à sauver des vies
Jonathan Cook
Jeudi 14 octobre 2021 - 15:17 | Last update : 6 days 15 hours ago
Le financement américain du système israélien d’interception de missiles s’inscrit dans le cadre d’efforts plus larges pour consolider un système militaire de domination mondiale
Les conflits qui ont ressurgi au Congrès américain en septembre autour de la suspension d’une enveloppe d’un milliard de dollars pour Israël ont souligné à quel point les débats sur l’aide financière américaine à Israël sont déconnectés de la réalité, même chez de nombreux critiques.
Pendant 48 heures, un petit groupe de démocrates progressistes à la Chambre des représentants des États-Unis a réussi à saboter une mesure visant à régler la note qui permettrait à Israël de refaire le plein de missiles d’interception pour son Dôme de fer.
Israël a développé le système Dôme de fer avec le généreux soutien financier des différentes administrations américaines, au lendemain de la guerre contre le Hezbollah au Liban en 2006. Aujourd’hui, il sert soi-disant à protéger Israël des roquettes à courte portée, largement improvisées, tirées sporadiquement depuis Gaza.
Ce groupe de démocrates progressistes, communément surnommé la squad (équipe), a douché une première tentative de leurs dirigeants au Congrès qui avaient inscrit une enveloppe d’un milliard de dollars pour Israël dans le budget américain.
Mais l’argent destiné au Dôme de fer a rapidement été à nouveau présenté en tant que projet de loi autonome adopté à une écrasante majorité, à 420 voix pour et neuf contre.
Deux représentants, dont Alexandria Ocasio-Cortez (célèbre membre de la squad), ont voté « présents » – comptant effectivement comme une abstention.
Une aide militaire annuelle de 3,8 milliards de dollars
Les stocks de missiles pour le Dôme de fer, lesquels coûtent au moins 50 000 dollars pièce, ont été épuisés en mai, lorsqu’Israël a déclenché des affrontements généralisés avec les Palestiniens en intensifiant sa colonisation des quartiers palestiniens près de la vieille ville de Jérusalem et en faisant violemment irruption à la mosquée al-Aqsa.
Les groupes militants palestiniens ont tiré une multitude de roquettes depuis Gaza, sous blocus israélien depuis quinze ans. Le Dôme de fer a intercepté ces roquettes avant qu’elles ne puissent atterrir en Israël.
Cette semaine, c’est au Sénat que la colère s’est déclenchée quand le républicain Rand Paul, fervent détracteur de l’aide étrangère américaine, s’est opposé au projet de loi et lui a ainsi refusé un assentiment unanime. Il devra maintenant passer par un processus législatif plus compliqué.
Ce dernier financement pour le Dôme de fer vient s’ajouter aux 3,8 milliards de dollars qu’Israël reçoit chaque année des États-Unis en aide militaire, ce qui a fait d’Israël le plus grand bénéficiaire, de loin, de ces largesses.
Pour mettre en perspective la nouvelle tranche d’aide du Dôme de fer, c’est le double de la contribution annuelle de Washington au budget de l’OTAN.
Sous Donald Trump, l’administration a transformé le financement américain de l’OTAN en une grande controverse nationale, défendant l’idée que les États-Unis portaient une trop grande part du fardeau. Mais presque personne n’a trouvé à redire au sujet de l’énorme facture militaire que les États-Unis doivent régler pour le Dôme de fer.
Grâce à son bref blocage, le groupe de démocrates a surtout réussi à mettre au grand jour le fait que les États-Unis paient le stock de missiles d’Israël. Comme les dirigeants de la Chambre, le lobby israélien avait espéré que l’argent pourrait être transféré discrètement, sans attirer l’attention.
Le peu de débat qui s’en est suivi avait pour objet de savoir si Israël a véritablement besoin de l’aide militaire américaine. Quelques commentateurs ont demandé pourquoi Washington équipe de missiles l’un des pays les plus riches de la planète au beau milieu d’une pandémie qui a durement frappé l’économie américaine.