Le vieux rêve d’un État binational

jeudi 30 novembre 2023

Dossier : Gaza, l’onde de choc
"Le vieux rêve d’un État binational"

par Shlomo Sand

En Palestine, le communisme a été fondé en 1919 par des immigrés juifs, qui avaient quitté le mouvement sioniste pour créer le Parti ouvrier socialiste hébreu. Celui-ci prit, en 1922, l’appellation yiddish de Palestinishe Kommunistishe Partei (Parti communiste palestinien, PCP). Le PCP a adhéré à la IIIe Internationale (Komintern), dirigée par le Parti communiste soviétique.

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Taysir Batniji. — « Temps supendu », 2006, © Taysir Batniji

Durant toute son existence, ce parti a récusé le sionisme, qu’il considérait comme un mouvement colonialiste illégitime. Les communistes ne pensaient pas que les Juifs du monde entier constituaient une nation spécifique, et ne croyaient pas qu’après deux mille ans ils puissent revendiquer des droits historiques en Palestine. Ils rejetaient la déclaration Balfour (1), qualifiée d’acte impérialiste à l’état pur, appelaient à l’expulsion des Britanniques et à la création d’un État démocratique à majorité arabe, où les Juifs, y compris ceux arrivés après 1918, seraient des citoyens à égalité de droits. Ces positions ont eu pour effet, pendant toute la durée du mandat britannique (1922-1948), d’attirer au PCP la haine de la partie juive, et de le maintenir dans l’isolement, car il parvenait tout aussi difficilement à recueillir le soutien de sympathisants arabes. La grande révolte arabe des années 1930 lui permit cependant de renforcer ses rangs et de voir son influence progresser quelque peu parmi les travailleurs urbains. Au nom de l’« internationalisme prolétarien », il n’a cessé, durant toute cette période, d’appeler à la solidarité entre la population locale et la communauté des immigrés.

L’isolement du parti vis-à-vis des Juifs s’est notablement résorbé après l’entrée en guerre de l’URSS en 1941. Le changement de position du PCP concernant l’implantation hébraïque lui a aussi permis d’élargir significativement son audience. Un tournant s’était lentement amorcé à la fin de la seconde guerre mondiale, avec la prise de conscience de la réalité de l’entreprise nazie d’extermination. Le maintien en Allemagne de camps de rescapés et de réfugiés, qu’aucun État occidental n’était disposé à accueillir, créait une situation insupportable, qui amena les communistes juifs de Palestine à réviser leur position.

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Source : Le Monde Diplomatique