Résister en musique à Gaza

dimanche 30 août 2015

RESISTER EN MUSIQUE A GAZA

Après leur concert magnifique à Aix en Provence le 29 août 2015, magnifique, émouvant et chaleureux, malgré une intervention de la mairie d’Aix en Provence qui a rendu politicien un événement culturel (voir le communiqué ci-dessous), une interview exclusive de deux jeunes gazaouis talentueux, membres de la tournée française du Palestinian Youth Orchestra (PYO).
Créé en 2004 par le Conservatoire National de Musique Edward Saïd (Palestine), l’Orchestre des Jeunes de Palestine a pour objectif de réunir des jeunes Palestiniens du monde entier au sein d’un ensemble orchestral de haut niveau

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Rima a 17 ans, Raslan en a 14. Tous deux vivent à Gaza et sont trompettistes au sein duPalestinian Youth Orchestra (PYO). Leur passage en France pour quelques concerts donne l’occasion de revenir avec eux sur la situation dans la Bande de Gaza, et mettre en lumière une autre forme de résistance, culturelle et artistique.

L’année dernière, la Bande de Gaza a été victime d’une opération israélienne de grande ampleur, « Bordure protectrice ». Quelle est la situation depuis ?

Rima : C’est évidemment très difficile. Depuis que nous sommes enfants, tous les deux ans, nous subissons une nouvelle opération israélienne, où nous perdons encore davantage de proches. L’été dernier, l’hôpital près de chez moi a été détruit. Dans la ville de Gaza, nous ne disposons plus que d’un grand hôpital, et il a été touché l’été dernier. Il y avait beaucoup de blessés durant les bombardements, mais pas assez de médecins. Plusieurs écoles ont subi de graves dommages. Pour éviter que des enfants n’aillent plus à l’école, le système scolaire s’organise en trois groupes. Les premiers ont cours de 7h à 10h, les seconds de 11h à 13h, et les troisièmes de 14h à 17h. Depuis l’année dernière, rien n’a été reconstruit, et beaucoup de personnes ont sombré dans la pauvreté. Ceux qui font des études n’ont aucune perspective, et surtout très peu de possibilités de logements. Ce qui conduit à des taux importants de décrochage scolaire.

Raslan : Nous souffrons du blocus imposé par l’armée israélienne. L’une des principales souffrances c’est l’ennui. Nous n’avons pas d’activités de loisirs. C’est d’ailleurs pour ça que j’ai commencé à apprendre à jouer de la musique. Une petite école de musique a pu ouvrir, avec quelques instruments. Mais nous faisons partie des chanceux, car la plupart des enfants n’ont rien, et ils jouent dans la rue, au milieu d’un décor marqué par la guerre.

Lorsque les médias parlent de Gaza, deux images reviennent inlassablement : le Hamas et les destructions des bombardements. Vous, au contraire, vous détruisez les préjugés. Quel sentiment avez-vous par rapport à ça ?

Raslan : Nous souhaitons d’abord montrer que si la musique est universelle et appartient à tout le monde, les Palestiniens en font aussi partie. En somme, que nous ne sommes pas différents des autres peuples. Montrer que, nous aussi, nous aimons la paix, nous aimons vivre pacifiquement. Dire aussi que nos rêves ne sont finalement pas éloignés de ceux d’enfants d’autres pays. À Gaza, vous avez aussi beaucoup de dessinateurs. Ensemble, nous adressons un message de paix, mais aussi une exigence, celle de pouvoir vivre comme tous les autres enfants du monde.

Rima : Mais même de ça nous sommes empêchés. L’école de musique a ouvert, si je me souviens bien, en 2006. À l’époque, nous avions un piano et quelques guitares. Nous avons beaucoup travaillé pour agrandir l’école, obtenir davantage d’instruments. Lors des bombardements de l’hiver 2008, l’école de musique a été touchée. Notre unique piano était en miettes, et de nombreux instruments étaient inutilisables. Nous étions effondrés. Puis, nous sommes repartis de l’avant et nous avons reconstruit une école, bien plus grande que celle d’avant. Avec les bombardements de l’été dernier, les meilleurs étudiants, ceux qui pouvaient bénéficier d’une bourse, et beaucoup de professeurs, notamment des étrangers volontaires, comme le pianiste, ont préféré quitter Gaza pour pouvoir continuer à enseigner ou à apprendre. Aujourd’hui, nous manquons de professeurs pour accueillir les nouveaux étudiants. Mais quoi qu’il arrive, nous continuerons à jouer. Chaque concert que nous faisons à Gaza est un plaisir. Nous avons organisé un petit festival « La mer et la liberté ». Durant quatre jours, différents groupes se sont succédé sur scène. Ce n’est pas simple, mais ce sont des moments remplis d’émotions.

Par Thomas Vescovi
Etudiant-chercheur en Histoire contemporaine, spécialisé dans l’Histoire du Proche-Orient
Membre de l’Association France Palestine Solidarité
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Paris 26 octobre 2015
L’édition 2015 de la Biennale des Orchestres de Jeunes du Grand Théâtre de Provence prévoyait la participation uniquement d’orchestres de jeunes (Palestine, Roumanie et France). Des pressions politiques ont imposé à leur côté la présence d’un quatuor professionnel présenté comme israélien (un ensemble qui n’est ni un orchestre ni formé de jeunes).


La programmation de dernière minute, dans la saison 2015-2016 du Grand Théâtre de Provence (GTP), d’un concert du quatuor dit israélien (Quatuor Aviv) aux cotés de l’Orchestre des Jeunes de Palestine (PYO) rend politique un évènement autrement culturel. Résultant de fortes pressions de la Mairie d’Aix-en-Provence sur le GTP, elle instrumentalise l’orchestre d’une manière inappropriée, sans prendre en compte la valeur artistique et musicale de cet orchestre en soi. En mettant sur le
même plan occupant et occupé, elle rappelle aux jeunes musiciens palestiniens la situation politique dont ils sont les victimes.

Cette symétrie imposée est surprenante par son manque de réciprocité (on n’impose pas une présence de musiciens palestiniens aux côtés des musiciens israéliens invités à Aix). Elle devient inacceptable lorsqu’on connait l’asymétrie de la situation sur le terrain.
Pour les musiciens de l’Orchestre des Jeunes de Palestine, dont les vies sont affectées quotidiennement par les contraintes qu’Israël leur impose, le fait de pouvoir être accueillis dans une ville française uniquement à condition qu’un ensemble israélien y soit aussi n’est ni compréhensible ni acceptable.

Le PYO et le Conservatoire Edward Saïd condamnent catégoriquement cette instrumentalisation politique et la manière dont elle se reflète dans la promotion par le GTP des concerts du Quatuor Aviv et du Palestine Youth Orchestra.

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L’Orchestre des Jeunes de Palestine a aussi fait vibrer plus de 2 000 spectateurs au théâtre romain de Fourvière de Lyon

JPEG - 60.5 ko La soprano Mariam Tamari (photo Roland Calba)

JPEG - 59.5 ko Le public (photo Roland Calba)

et l’article du journal quotidien, le Progrès de Lyon
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