UE : Interdire le commerce avec les colonies de peuplement illégales
Les échanges commerciaux avec les colonies situées dans des territoires occupés contribuent à des violations des droits
(Bruxelles) – La Commission européenne devrait interdire les transactions commerciales de l’Union européenne avec les colonies de peuplement dans tous les territoires occupés dans le monde, a déclaré Human Rights Watch aujourd’hui en devenant signataire d’une Initiative citoyenne européenne (ICE). Cette initiative citoyenne, enregistrée auprès de la Commission européenne en septembre 2021 et lancée officiellement le 20 février 2022, appelle à l’adoption d’une loi européenne interdisant d’importer dans l’UE des produits originaires de colonies illégales et d’exporter des produits de l’UE vers ces territoires.
Le transfert d’une population civile par une puissance occupante vers un territoire occupé militairement constitue une violation de la Quatrième Convention de Genève et constitue un crime de guerre aux termes du Statut de Rome, le traité fondateur de la Cour pénale internationale (CPI). Acheter des produits originaires de colonies installées dans des territoires occupés ou exporter vers elles facilite la poursuite de ces violations du droit international humanitaire. Cela enracine également les violations des droits humains qui souvent émanent des colonies illégales, notamment les confiscations de terres, l’exploitation des ressources naturelles et le déplacement des populations locales ou la discrimination à leur encontre.
« Les colonies de peuplement confisquent illégalement aux populations locales leurs terres, leurs ressources et leurs moyens d’existence », a déclaré Bruno Stagno, responsable principal du plaidoyer à Human Rights Watch. « Aucun pays ne devrait permettre le commerce de biens produits grâce à des vols de terres, des déplacements de population et des actes de discrimination. »
L’UE devrait également interdire les transactions commerciales qui contribuent à l’extraction illégale de ressources dans des territoires occupés, ce qui constitue aussi une violation du droit international humanitaire, a affirmé Human Rights Watch.
Human Rights Watch se joint à plus de 100 organisations de la société civile, mouvements populaires, syndicats et politiciens en apportant son appui à l’Initiative. Celle-ci repose sur une disposition visant à permettre aux citoyens européens de demander à la Commission européenne de prendre en considération une proposition d’action législative. Si l’Initiative recueille au moins un million de signatures, la Commission sera juridiquement dans l’obligation d’envisager une interdiction des importations de biens en provenance de colonies illégales.
Les instigateurs de l’ICE ont tout d’abord sollicité son enregistrement en juillet 2019, mais la Commission a initialement refusé de l’enregistrer, au motif que l’Initiative cherchait à imposer une sanction. La Cour de Justice européenne a annulé cette décision en mai 2021, statuant que la Commission aurait dû considérer l’Initiative comme une mesure commerciale générale. Cette prise de position a incité la Commission à changer d’avis, à enregistrer l’Initiative et à reconnaître sa propre compétence pour réglementer le commerce avec les colonies.
L’UE et ses États membres devraient interdire les transactions commerciales avec les colonies afin de se mettre en conformité avec leur obligation, aux termes des Conventions de Genève, d’assurer que le droit international humanitaire soit respecté, a déclaré Human Rights Watch. L’illégalité des colonies au regard du droit international humanitaire est bien établie et découle en partie du rapport étroit existant entre elles et la discrimination et les dommages économiques subis par les populations locales, comme l’a énoncé le Comité international de la Croix-Rouge en 1958 dans un commentaire sur la Convention de Genève.